Notes Philosophiques ou Voyage en Anachronie -

L'Histoire

Samedi 8 Octobre 2005
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LE PAPE, L'EMPEREUR & LE ROI

ou le

SOMMET DE VILLEFRANCHE

1538

 

    Imaginons.

     Nous sommes, disons en 2038. Le Christianisme, pour ne pas dire la Chrétienté, se sentant menacée politiquement et théologiquement par la montée de l'Islam sous la forme de la constitution d'une armée pan islamique, [branche militaire de l'Europe Nord/Sud, incluant l'actuelle Union Européenne, la Turquie, les nouvelles Républiques Islamiques de Russie, l'Afghanistan, le Pakistan, le Maghreb, la Lybie, l'Egypte, etc.], voit les institutions religieuses Chrétiennes mondiales implantées aux Etats-Unis comprenant quant à eux : le Canada et l'intégralité de l'Amérique du Sud, 

   Cette nouvelle Europe, comme cette nouvelle Amérique, chacune gouvernée par un pouvoir centralisé, souhait conclure un accord diplomatique, si ce n'est de paix, afin de rétablir le commerce et l'ordre mondial.

    Cette configuration est, peu ou prou, celle de l'Europe de 1538. Comme aujourd'hui, la considération démontrée à l'endroit de l'Islam tient plus de la crainte révérencielle et d'une diplomatie utilitariste que d'une vraie perception Chrétienne de la nécessité d'entretenir un dialogue fraternel avec l'Islam. François Ier en est la vivante image. Roi de France, fils de Louise de Savoie, ses vues sont mondiales, c'est à dire Européenne. Face au très puissant et craint Empereur, Charles Quint, dont le territoire Romain et Germanique couvre l'Europe de l'Est et l'Espagne ainsi que les possessions du Nouveau Monde, la clé du nouvel ordre renaissant est le Pape. "Qui n'est pas avec moi est contre moi". Cette maxime Christique aussi pleine de menaces que de promesses, conduit le Roi de France Très Chrétien à tenter le "diable".

    L'Espagne de l'Empereur Charles Quint, dont il a recouvré les deux tiers face aux troupes organisées de Barberousse, est néanmoins menacée à partir d'Alger, véritable base navale de Kheir ed-Din, dernier frère de Barberousse l'intrépide.

    D'une part, l'Espagne en la personne de Charles-Quint, première puissance d'Europe. De sa grand-mère maternelle il tient la Castille, de son grand-père paternel, Ferdinand, il a la mainmise sur l'Aragon, Naples et la Sicile. De sa grand-mère maternelle, Marguerite de Bourgogne, il peut prétendre aux Pays-Bas, Flandres, l'Artois, la Franche-Comté. De son grand-père paternel, Maximilien, il est Empereur d'Autriche et du chef des Habsbourg peut prétendre à la domination du Saint-Empire.

    Les conquêtes se suivent et se ressemblent : Buenos-Aires fondée par Mendoza, le Chili conquis par Valdivia, le Mississippi sur lequel navigue de Soto, etc.

    Face à lui, la France. Gouvernée par François Ier, contradictoire allié des "Turcs", c'est à dire de Soliman II, dit le Magnifique. Il est l'ennemi juré de Charles-Quint qui , part du feu, ne pouvant lui ôter la Hongrie en 1526, l'arrête à Vienne en 1529.

    Le Roi de France a italianisé la France et son projet de moins en moins secret est, outre de franciser l'Italie, d'en venir au rêve d'une monarchie mondiale -européenne dirait-on aujourd'hui. Mais entre lui et ses rêves, des hommes imposants veillent.

    A Eze, sans en connaître les détails, l'on sait ce qui se trame. Du Sud, le risque omniprésent d'invasion ottomane. De l'Ouest, les troupes françaises qui, de victoires en déconvenues, constituent l'éternelle menace alors que notre Prince, Charles III dit "le Débonnaire", époux de la belle-sœur de Charles-Quint, est naturellement l'allié de ce dernier. Béatrice de Portugal, Princesse de Savoie, meurt à Nice en 1538. Le Duc de Savoie est donc en deuil lorsqu'il reçoit le Congrès de Nice.

A partir de là, la lutte sera incessante. Les partis se scindent, s'opposent et les familles éclatent.

Le Congrès de Nice de l'année 1538 entre François Ier et Charles-Quint est un échec cuisant et débouche en 1543 au siège de Nice où chacun sait que s'illustra Catherine Ségurane puis à la tentative de prise de la forteresse d'Eze par Khayr-Ed-Din Barberousse.

Bertrand Figuiera n'est pas encore le Syndic d'Eze lorsqu'il prend l'initiative qui conduira à l'exécution de son cousin Cays de Pierlas mais, fils de Guillaume, Capitaine du Régiment de Soria en 1500, il sut conduire la manœuvre qui mit fin au complot du "parti français" et dérouta, dans tous les sens du mot, les troupes du pirate Barberousse.

Au sujet de ce dernier, il est vrai, les textes sont divergents. Vraisemblablement, il s'agit bien là de l'un des frères "Barberousse", corsaires convertis à l'Islam et d'origine grecque ou sicilienne.

La crainte rôdait et était partout. Elle me rappelle cette anecdote contée par le philosophe anglais Hobbes nous disant que sa fascination morbide pour la peur, alias la mort, date de sa naissance provoquée prématurément par la vision qu'eut sa mère de l'Invincible Armada à l'horizon des côtes anglaises.

La mémoire des pierres, si elle pouvait parler, contient autant de douleurs que de joies qui, confondues, donnent à Eze, le soir venu, son inquiétante mais si belle cape de velours noir.

Charles Quint

    Face à une telle situation de conflit, la règle médiévale encore en vigueur en cette moitié du 16e siècle, veut que l'on cherchât une solution diplomatique. Le lieu de la rencontre? Nice et Villefranche.

 

    Paul III, successeur des Pontifes qui pouvaient quelques années plus tôt prononcer la Paix de Dieu sans avoir à forcer le ton, a cette fois plus de mal à se constituer en arbitre des difficultés - le mot est faible - qui émaillent les relations des deux puissants monarques. L'Evêque de Rome séjournera à Nice, alors que le Roi de France, dès la fin du mois de mai, a planté ses tentes, sa cour et son armée non loin. Charles Quint, tenant des mers et océans, préfère demeurer à Villefranche.

Le Pape Paul III

 

    Les sherpas du sommet ne sont pas encore de hauts fonctionnaires, mais des légats, princes de l'Eglise, maréchaux et généraux. Le Pape Alexandre Farnèse, élu depuis quelques quatre années, est parti de Rome le 23 mars pour arriver à Nice le 16 mai.

    Le successeur de Pierre réside au couvent des Frères Mineurs, sous le service et la protection de deux cents hommes de pied et deux cents chevaux légers, outre sa garde personnelle de lansquenets. Les cardinaux sont, quant à eux, logés dans tout Nice, suivis de peu par leurs homologues français.

    Pour faire bonne mesure, comme à son habitude, l'Empereur est arrivé à Villefranche quelques temps auparavant. Si vis pacem para bellum, aussi sa suite doit-elle inspirer le respect. Vingt-huit galères, trois nefs, sept enseignes de gens à pied, soldats aguerris qui permettent à Charles Quint de laisser sa garde espagnole au Palais.

    Avant que le Roi de France n'arrive, l'Empereur entama des négociations avec le Pape. François Ier séjournera derrière le château de Nice au lieu-dit la Marina. Ce n'est que le 2 juin que ce dernier présentera ses hommages au Pontife.

    Farnèse, ce seul patronyme évoque munificence et rareté. Aussi, Paul III va-t-il faire couvrir de fleurs et de tapisseries l'humilité de sa demeure monacale. Le Roi de France ne peut, lui non plus et encore moins que d'autres, faire "moins". Deux heures avant son arrivée, ses chevaux légers rejoignent ceux de son hôte le Pape. S'y ajoutent les six milles lansquenets du Comte Guillaume, rangés en bataille à l'arrière du bâtiment. Le Roi François fut prisonnier, otage libéré sous l'humiliante condition de la rançon. On ne l'y prendra plus. Mieux encore. Sur les hauteurs de Nice, mille légionnaires Provençaux, les deux cents gentilshommes de la Maison du Roi, les Princes, seigneurs, comtes et barons. Enfin, le Roi et sa garde personnelle. C'est sur leurs mules et coiffés de leur chapeau cardinalice que les prélats vinrent à la rencontre du Roi de France. Les cardinaux Cibo et Césarin font entrer le Roi dans la résidence du Pape. Ce dernier lui évitera le protocolaire abaissement d'avoir à lui embrasser les pieds mais l'accolera chaleureusement. François présente ses enfants au Pontife, lequel fait sortir du groupe ses deux petits neveux de cardinaux. Enfin, les uns et les autres tiennent table ouverte.

    Les Niçois furent tous témoins de cette grande activité alors que les autorités, par mesure de sûreté, n'avaient laissé ouvertes que deux portes des murailles de Nice. L'une pour entrer, l'une pour sortir.

    Décision  du Duc de Savoie, maître des lieux, qui, pour montrer sa confiance, ne résidait pas au château mais au sein de sa ville.

    Le huit juin, il est temps pour les protagonistes de faire échange de leurs familles. Aussi, la Reine et ses dames de compagnie vont-elles visiter le Pape. Le onze dudit mois, il s'agit cette fois d'aller voir l'Empereur. Il demeure à Villefranche et ne semble pas vouloir en sortir. Aussi, afin de recevoir cette noble assemblée, fait-il tirer un pont de bois afin d'éviter la traversée de la rade du port à cette suite féminine. L'incident est connu. Sous le poids de cette cohorte lourdement parée, l'Empereur, le Duc de Savoie, le Duc de Mantoue et toute cette noble troupe tombent à la mer.

    Cette baignade n'empêcha pas la signature d'une trêve de dix années.

 

POURTANT...

 

Bertrand Fighiera d'Eze est le Syndic d'Eze en cette année 1547.

Quatre années plus tôt, épisode connu, François 1er avait occupé avec les "Francs-Turcs" toute la zone côtière du Comté.

Bertrand est cousin de la famille Cays et notamment de Gaspard, lequel prendra parti pour le Roi de France.

Le 25 septembre 1543, les bâtiments Turcs abordent aux côtes de la Mer d'Eze sous l'éclairage du dit Gaspard Cays qui connaît bien Eze.

L'infortuné Cays ne pouvait penser que ses alliés d'un jour le laisseraient au matin et le voilà, à l'aube du 28 septembre, entre les mains des prêtres Don Geoffroi Asso et D' Ilonse, sous l'autorité de Bertrand Figuiera, ès-qualité de Syndic.

Cays est jugé à Nice, cette ville ayant un for de juridiction et est mis à mort, décollé puis coupé en pièces remises en des tonneaux lesquels seront exposés dans les villages avoisinants, dont Eze, Bertrand ayant pris soin d'y faire figurer un avertissement sur la fin qui attend qui s'attaque aux Figuiera.

Dureté du temps mais la survie était à ce prix.

Bertrand Fighiera mourra en 1555, ayant pris soin d'occuper la chambre la plus modeste de sa maison, sans doute pour expier cet acte de "justice". 

 


Xavier Cottier
Rédigé par Xavier Cottier le Samedi 8 Octobre 2005 à 15:38

L'Histoire

UN OUVRAGE DE REFERENCE, UN OUVRAGE DE DEFERENCE...
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Un ouvrage de référence :

Un ouvrage de déférence également, à l'endroit des familles Niçoises si maltraitées par la postérité, le tourisme, l'histoire et, hélas, l'actualité...

Pourtant, les patronymes du Pays Niçois sont autant de voyages divers au sein des marches de notre Comté. Localisés ou plus répandus, ils sonnent comme autant de chansons familières ou plus étranges.

Pour les découvrir, savoir d'où vient le vôtre, consultez cet ouvrage qui, ne se prétendant pas savant, le devient tant sa méthode est rationnelle et exigeante.

A chaque entrée alphabétique, assortie d'un index lisible et clair, la localisation du patronyme et quelques illustrations connues ou moins connues de quelques membres de la famille concernée.

"Les noms de famille en Provence - Alpes Côte d'Azur / Histoires et anecdotes" Ouvrage collectif publié par "Archives et Culture", 26bis rue Paul Barruel, 75015 Paris. Code ISBN : 2-911665-49-X (prix public 30,19 euros)

 


Xavier Cottier
Rédigé par Xavier Cottier le Vendredi 7 Octobre 2005 à 22:01

L'Actualité

Jeudi 6 Octobre 2005
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Un site à ne pas manquer :

 

http://www.wm-arts.com/

 

Où Walton Mendelson présente ses propres oeuvres mais, également, nous introduit aux arcanes de compositeurs contemporains et d'oeuvres littéraires inédites.

 

Site en anglais.


Xavier Cottier
Rédigé par Xavier Cottier le Jeudi 6 Octobre 2005 à 16:17

L'Actualité

Jeudi 6 Octobre 2005
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Anciens régimes...

    Une dépêche des Nations Unies dont la teneur suit, est de nature à nous renvoyer à de plus sages pratiques :

KOFI ANNAN APPELLE LES PAYS PAUVRES À PRÉSERVER LEUR CUISINE TRADITIONNELLE CONTRE LA CULTURE DU FAST-FOOD
 

New York, Oct  5 2005  6:00PM
 

Suite au dernier rapport de l'Organisation mondiale de la santé sur l'obésité qui faisait apparaître que ce problème de santé publique ne touchait plus seulement les pays développés mais aussi les pays en développement, le Secrétaire général a appelé les pays pauvres à préserver leur cuisine traditionnelle et à résister à l'importation de la culture du fast-food.
« Bien que nous ne soyons pas dans le business du régime, nous sommes préoccupés par les problèmes de santé publique », a déclaré aujourd'hui le Secrétaire général, lors d'un point de presse au siège de l'ONU à New York, en réponse à une question qui faisait référence aux dernières statistiques publiées par  l'Organisation mondiale de la santé <"http://www.who.int/fr/">(OMS) sur l'obésité dans le monde.
« Chacun doit pouvoir se nourrir correctement, non seulement dans les pays développés mais aussi dans les pays en développement », a affirmé Kofi Annan.
« La plupart des pays en développement n'avaient pas ce problème d'obésité et ils ne devraient pas l'importer chez eux en mangeant et buvant une nourriture ou une cuisine mal adaptée. Ils devraient plutôt s'attacher à garder leur régime alimentaire traditionnel qui a permis à leur population de rester minces et sveltes », a-t-il encore dit.
                                                                                                Le 22 septembre dernier, l'OMS avait <"http://www.who.int/mediacentre/news/releases/2005/pr44/fr/index.html">alerté la communauté internationale sur le fait que l'obésité et l'excès pondéral n'étaient plus seulement le problème des pays riches mais devenait un véritable fléau dans les pays à revenu intermédiaire ou faible.
D'après les dernières estimations de l'agence de l'ONU pour la santé, le nombre de personnes présentant un excès de poids pourrait passer de 1 milliard aujourd'hui à 1,5 milliard en 2015.
Plus de 75 % des femmes âgées de plus de 30 ans présentent un excès pondéral dans des pays aussi différents que l'Afrique du Sud, la Barbade, l'Egypte, les Etats-Unis d'Amérique, Malte, le Mexique et la Turquie.
« L'ampleur même du problème de l'excès pondéral et de l'obésité est stupéfiante. L'aggravation rapide de ces deux problèmes dans de nombreux pays à revenu faible et intermédiaire laisse présager une charge écrasante des maladies chroniques pour ces pays au cours des 10 à 20 prochaines années, si des mesures ne sont pas prises dès maintenant », avait déclaré Catherine Le-Galès Camus, sous-directrice générale de l'OMS chargée des maladies non transmissibles et de la santé mentale (voir notre <"http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=11095&Cr=OMS&Cr1=obésité">dépêche du 22 septembre 2005).

    Certes, cet avertissement - un de plus - ne nous est pas directement destiné. Pourtant, il nous concerne.

    Le régime dit Crétois - fruit d'une enquête de l'Organisation Mondiale de la Santé dans les années 50) a démontré que les habitants de cette île Grecque détenaient le plus faible taux de mortalité liée aux maladies cardio-vasculaires. La raison de ce phénomène inégalé dans le monde? Leur alimentation.

    En fait : de l'huile d'olive, des poissons (quatre fois par semaine), des légumes et des fruits frais, peu de viande, du fromage de chèvre. Il s'agit là du régime niçois par excellence.

    L'huile d'olive tout d'abord. Elle fut une production locale dominante pendant des siècles et l'apport régulier des repas quotidiens. Il n'est de commune de notre Comté qui n'eût son moulin.

    Les légumes et les fruits frais font, de même, partie intégrante de la production locale dont la partie non vendue sur les marchés locaux (Nice, Monaco, Menton), composaient la note dominante des repas niçois.

    Enfin, le fromage de chèvre. Longtemps l'apanage du haut et du moyen pays (dont Eze au premier chef), il est consommé ici depuis le haut Moyen-âge.     

GASTRONOMIE EZASQUE

 

    Aujourd'hui où l'on peut trouver du cuissot d'autruche dans la moindre épicerie de nos campagnes françaises et des cerises en hiver, il n'est pas superfétatoire de dire que la cuisine des régions est liée à la production locale et aux saisons.

 

    Il faut convenir qu'à Eze, la première est réduite en ses variétés et que les secondes se limitaient à une saison chaude et à une saison "froide".

 

    Le seul produit annuel est celui de la pêche. Ainsi, les Figuiera laisse-t-il en hiver leur résidence du "haut" pour celle d'Eze-Sur-Mer, dénommée à juste titre "Lou Pescaire".

 

Photo Giletta - Archives photographiques (Médiathèque du Patrimoine) (c) Caisse nationale des Monuments historiques

 

        Y réside à plein-temps un pêcheur qui à l'instar de ses prédécesseurs répond à la demande familiale en allant quérir les bancs réguliers qui d'Est en Ouest et d'Ouest en Est laissent leur précieuse manne dans les filets. Nous savons que Ludovic Figuiera pouvait les distinguer à l'oeil nu de la fenêtre de sa salle à manger d'Eze et allait mander Philippe Fulconis, son ancien bosco, afin de sortir le pointu.

 

         Ainsi, la recette vraiment Ezasque demeure celle quasi ésotérique de la morue à l'aigre-doux, savante composition tirée d'influences culinaires oubliées. De même la daube qui, à Eze, mitonnée non pas des heures mais des jours, devient ce plat roboratif des hivers rigoureux - il y en eut - qui, confit comme une viande de gibier, peut durer jusqu'à des semaines.

 

          Le feu ne doit jamais s'éteindre et, d'ailleurs, il chauffe le reste de la maison (seules les maisons "modernes" ont deux cheminées), le four accommodant le pain, les fonds de tartes (sucrées ou salées) et l'eau des bassinoires qui iront rendre les lits moins glacés.

 

           Eze produit sa "piquette" et elle se boit généralement avec quelques figues apéritives et filets d'anchois délicieusement sucrés.

 

           Les diverses photos d'Ezasques que j'ai pu montrer au fil de ce site montrent des hommes et des femmes minces. Sans doute, la nature du site en est-elle la cause car certaines familles font de la cuisine un art de vivre poussé à son paroxysme. Les membres de celles plus frugales, ou économes de cet indispensable poste du budget familial, iront dévorer en cachette chez les autres!

 

            Le bas du village est entièrement cultivé et la ferme de la Fouant Rossa qui occupe bien les trois quarts de la zone est dotée d'une véritable exploitation agricole mise en fermage par les Figuiera depuis des lustres. (N'est-ce pas là que furent inventées les patères grecques aujourd'hui au British Museum? - Cf. Antiquité). Une trentaine de vaches - le lait coule à flots -, des chevaux pour tirer la charrue - il y fut produit des céréales pendant des siècles -, une importante vigne, des figuiers, caroubiers et oliviers à profusion.

 

             


LA RECETTE DU BONHEUR

 

    Une recette tirée d'un petit opuscule de mon arrière grand-mère figurant, pour aujourd'hui, la recette de la "Torta de Bléa" qui, à l'instar de celle mentionnée plus haut de la "morue à l'aigre-doux", est un savant compromis salé sucré.

 

      

 

 

   

      La cuisine, dite de famille ou bourgeoise, fait partie de l'histoire. Cette dernière, "petite" ou plus ambitieuse nous  définit sans nous restreindre, La gastronomie quant à elle semble avoir, de tous temps, épousé le monde environnant ou plus lointain. L'étudier constitue une sorte d'archéologie, ou même d'étymologie du goût qui a passionné de nombreux chercheurs. Si, par surcroit, elle est un élixir de longue vie, pourquoi donc s'en priver?

 

    Les hommes et femmes de "marketing" qui ont accolé à Eze ce titre ronflant de "village de la gastronomie" feraient bien de conseiller à nos établissements de revenir à cette cuisine du marché, chère à Bocuse et du "bon marché" ajouterais-je, face à la pompe dispendieuse de mets de compagnies aériennes!


Xavier Cottier
Rédigé par Xavier Cottier le Jeudi 6 Octobre 2005 à 15:54

L'Histoire

Mercredi 5 Octobre 2005
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De Turin à Eze

&

De la Baleine d'Eze 

        Sans grandes interruptions, de 1388 à 1860, le phare du Comté de Nice s'est imperturbablement situé à Turin. Les archives administratives importantes, diplomatiques également, s'y trouvaient et, en dépit de la seconde guerre mondiale, une partie s'y trouve encore. Charles-Alexandre Fighiera m'a conté les difficultés auxquelles il avait dû faire face lorsque, après la guerre, dûment mandaté aux fins de recouvrement des documents distraits par les administrateurs de la défaite de l'Axe, il s'était enquis des éléments concernant le Comté.

                        Relativement à Eze, deux sortes d'archives s'y trouvent.

                        Celles générales, notamment le document manuscrit dont je vais parler et celles chronologiques, couvrant toutes périodes et tous types d'informations.

                        Parmi les figures d'Eze, Antoine Fighiera joua un rôle particulier. Il est l'oncle de François Fighiera, Bayle Ducal d'Eze en 1587, marié à Marie Giacobi, de Contes, mort en 1612 sans postérité et le fils du Capitaine Constantin, Capitaine en 1589, marié à Catherine Régis, d'Eze, mort en 1620.

                    Juriste, plus spécialement criminaliste puisque lecteur d'instituts et de droit criminel à la Faculté de Turin, il fut proche du pouvoir au plus haut niveau en qualité d'auditeur du duc Charles Emmanuel Ier et du prince de Piémont.

                    Il est né à Eze, en mai 1577, dans la maison familiale de la rue aujourd'hui dite du Brec, celle que nous occupons aujourd'hui. Il gardera toujours un profond attachement au pays, notamment lorsqu'il s'agira de défendre ses intérêts à l'encontre d'Antoine Valperga, le comte léonin!

                    J'ajouterai qu'il se trouve être l'arrière grand-oncle du capitaine Louis Figuiera. Mais ce ne sont pas ses voyages qui le poussèrent à écrire mais plutôt ses observations. Ainsi, au titre de l'inventaire dit ":  PAESI /   PAESI IN GENERE E PER PROVINCIE", peut-on trouver ce manuscrit au titre alléchant :

                HISTORIE naturali e morali della Città e del Contado di Nizza dal principio del mondo sino all'anno 1638, compilate dal Senatore e Consigliere Avv.to Antonio Fighiera. Mss. autografo. Non contiene che una raccolta di fatti e di note storiche estratte da parecchi autori e da memorie manoscritte e disposte per ordine cronologico.

                                Dans le style du temps, c'est à dire démesuré, Antoine entame l'Histoire naturelle et morale de la Ville et du Comté de Nice du commencement du monde jusqu'à l'année 1638. Le fait est d'autant plus extraordinaire que le chapeau du dépôt nous indique : mémoire manuscrit et organisé par ordre chronologique.

                                Deux faits concernant Eze sont particulièrement extraordinaires à ses yeux :

                                Le premier est cette mention en l'année 1559 au sujet de François Fighiera son oncle, plus particulièrement le 1er octobre : "une baleine d'une grandeur démesurée s'est échouée sur la plage à la Mer d'Eze; la première personne qui a osé monter sur l'animal a été François Fighiera, mon oncle, qui n'avait que 14 ans."

                                Le second, qui recoupe les observations de George Sand sur les essences peuplant les escarpements d'Eze date, quant à lui, date du 14 décembre 1568 : "il est tombé tant de neige et le froid a été si vif que les caroubiers et les citronniers ont été brûlés."

                                Il est mort à Nice en 1643 et je dois dire que plusieurs fois j'ai entendu, au sein de la famille, faire référence à son sujet.

                                Plus généralement sur Eze, les archives de Turin possèdent le seul document que je connaisse relatif à la famille d'Yze que j'ai déjà évoquée ici. Il s'agit du serment de fidélité des frères Francois et Antoine d'Yze, Seigneurs de La Turbie et de Monaco et Co-seigneurs de Menton à Alphonse, Comte de Provence au titre des lieux dont s'agit, ce le 20 juillet 1177. 

                         Pourtant, rien ne me semble aussi captivant que cette idée du jeune enfant, ce petit François, futur Bayle ducal, qui monte sur le dos du cétacé géant.

                        Quant à la question des archives locales se trouvant en Italie, elle relève des frises du Parthénon. Toute revendication, justifiée après la guerre lorsque notre pays collationnait avec soin les richesses manuscrites ou imprimées, serait aujourd'hui risquée connaissant l'encombrement qui préside à leur conservation et, pire, le peu d'intérêt démontré lorsqu'il s'agit pour l'Etat de faire jouer son droit de préemption à l'endroit de documents d'intérêts régionaux.* Quant aux communes, c'est encore plus grave alors que toutes - ou presque- pressées qu'elles furent de se débarrasser de ce dépôt entre les mains d'autres autorités exogènes, nous privèrent de leur consultation.

* A l'exception des administrateurs de la Bibliothèque Nationale qui sont en train de faire un travail remarquable notamment sur les documents relatifs aux voyages en France.


Xavier Cottier
Rédigé par Xavier Cottier le Mercredi 5 Octobre 2005 à 11:35
Notes Philosophiques ou Voyage en Anachronie -