Europe
03/05/2019 23:41

Europe, bientôt une politique énergétique Franco-Allemande?

Nos sociétés démocratiques imposent l’agrément du public et cela revêt une importance particulière dans la mise en œuvre de projets énergétiques notamment franco-allemands ce qui exige de plus en plus la participation de la société. Dans la recherche, ce sujet est étudié en détail, en particulier dans le contexte de la transformation du système énergétique. La question d'une politique énergétique commune se pose et pour l'un et l'autre des pays souvent de façons différentes



En fait, l'approvisionnement énergétique en tant qu'entreprise technique provoque souvent des réactions violentes parce qu'il modifie sensiblement le paysage et la vie quotidienne. Les technologies énergétiques polarisent et trouvent des opposants et des partisans dont les opinions se reflètent dans la planification des projets.
L'énergie en France et en Allemagne : une comparaison complexe

Comparer la France et l'Allemagne est toujours un défi particulier. Malgré leurs relations privilégiées, les sociétés française et allemande sont très différentes, souvent même étrangères l'une à l'autre.

Un Etat-providence centralisé sur la rive gauche du Rhin et une république fédérale reposant sur une économie sociale de marché sur l'autre rive du Rhin font des différences considérables. Le climat, la géographie, l'histoire et les expériences culturelles conduisent également à des perceptions, des formes d'organisation, des attentes ou des préoccupations qui doivent être soigneusement prises en compte pour permettre des comparaisons.
Philosophies opposées en matière d'approvisionnement
Dépenses énergétiques moyennes des ménages privés en 2015 en France et en Allemagne
Dépenses énergétiques moyennes des ménages privés en 2015


L'orientation de la politique énergétique ne saurait être plus contradictoire, des infrastructures de réseau aux tarifs : La France planifie de manière centralisée et se concentre sur les grands projets, tandis que l'Allemagne encourage les initiatives décentralisées. Sur les marchés de l'électricité, plus de 800 fournisseurs d'électricité en Allemagne sont confrontés à une entreprise publique française peu concurrentielle. L'énergie nucléaire et les grandes centrales hydroélectriques françaises garantissent des prix de l'électricité bas, des tarifs sociaux et plus de 1% du budget de l'Etat par le versement de dividendes. La réduction prévue de l'énergie nucléaire de 25 % de la production nationale d'électricité nécessiterait l'arrêt d'un plus grand nombre de centrales nucléaires que l'arrêt complet de l'énergie nucléaire allemande.

De nombreux observateurs français, par exemple, ne comprennent pas la révolution énergétique allemande parce qu'ils essaient d'appliquer le modèle d'Electricité de France aux quatre principaux fournisseurs d'électricité en Allemagne. On oublie ainsi le rôle joué par les services publics municipaux et les acteurs individuels (des particuliers aux associations agricoles) dans le processus de transformation du système énergétique allemand. Le fait que le gouvernement fédéral allemand ne détienne pas de participation dans les fournisseurs d'énergie est également souvent négligé dans la comparaison franco-allemande.

Les systèmes de chauffage dans les ménages privés sont cités comme exemples de différences discrètes avec un grand effet. En France, l'électricité est la principale source de chauffage, de sorte que le prix de l'électricité a un impact notable sur la qualité de vie. Les tarifs sociaux de l'électricité pour les catégories de revenus les plus faibles sont très importants à cet égard. En Allemagne, par contre, l'électricité est utilisée pour le chauffage beaucoup moins fréquemment qu'en France. Cela explique pourquoi, bien que le prix de l'électricité en Allemagne en 2015 ait été presque deux fois plus élevé qu'en France, les dépenses moyennes des ménages privés en énergie ont été presque identiques dans les deux pays.

Cependant, cette affirmation doit être considérée d'une manière différenciée selon les régions, la France étant traversée par des zones climatiques très différentes.
"Citoyens en transition ", un premier pas vers une approche de recherche binationale
Résultats de l'enquête sur la compréhension de la transformation du système énergétique d'un point de vue allemand et français
Comprendre la transformation du système énergétique d'un point de vue allemand et français

Graphique : Projet TUCK "Citoyens en transition

En 2016, SynappCity (Karlsruhe), en collaboration avec l'Institut Wuppertal, Algorus Consulting (Paris), l'Université de Strasbourg et le petit entrepreneur Romain Nouvel, a reçu une subvention de la Fondation TUCK à Paris pour étudier les attentes et l'acceptation des citoyens pour les technologies de transformation des systèmes énergétiques.

L'accent a été mis sur deux technologies représentatives et polarisantes dans lesquelles l'équipe avait déjà développé sa propre expérience et un nombre suffisant de publications : éoliennes et compteurs intelligents.

Pour compléter la recherche documentaire, un atelier binational s'est tenu au Conseil de l'Europe à Strasbourg, auquel ont participé des experts de la recherche, des entreprises et des organisations civiles des deux pays ayant une expérience des projets, afin de discuter de questions et de solutions intéressantes.
Premiers aperçus de l'acceptation et des attentes dans une comparaison franco-allemande

En France aussi, la "Transition énergétique" est un tournant énergétique à l'ordre du jour. Ce revirement énergétique français se concentre sur la lutte contre le changement climatique sans pour autant viser à l'arrêt complet de l'énergie nucléaire.
    Les valeurs d'acceptation des technologies de transformation des systèmes énergétiques sont comparables dans les deux pays.
    Les deux entreprises expriment des préoccupations similaires, la protection du paysage en France en particulier offrant une très forte résistance à l'énergie éolienne.
    Des initiatives citoyennes existent dans les deux pays, tant pour que contre le développement des énergies renouvelables.
    Les grands projets et les projets prétendument " technocratiques " (comme l'installation obligatoire des compteurs intelligents Linky en France) alimentent les craintes et l'opposition.
    L'acceptation peut être encouragée par des approches structurées telles que l'information, la modération et la participation.

La France et l'Allemagne ont encore beaucoup à apprendre l'une de l'autre pour développer des solutions complexes pour une transformation démocratique des systèmes énergétiques et pour impliquer la population dans les processus de transformation. D'autres projets de recherche sont nécessaires pour développer ces résultats et contribuer ainsi à la réussite de ce changement socio-économique.



 

Henri Vario-Nouioua



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