France
09/04/2013 00:48

L’affaire Cahuzac crée la république inquisitoire

J’ai du mal à croire que le fait que Jérôme Cahuzac ait dit la vérité à un juge d’instruction qui ne l’avait même pas convoqué fasse de la France une république inquisitoire gouvernée par les médias. Je n’approuve pas la pratique de Médiapart et des autres… Mais ce qu’ils ont dit et écrit, ils ont le droit de le faire et je suis prêt à me battre pour qu’ils conservent ce droit.



Pour autant, le fait que François Hollande, Président de la république, ait manqué de cette colère spontanée qui aurait imposé le limogeage des ministres compétents, voire de tout le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, me laisse perplexe. Cette froideur-là, ce manque d’esprit de riposte pourraient s’avérer de nature à mettre en danger les intérêts supérieurs de la république. Pierre Moscovici, quant à lui, aurait dû, avant même de déclencher une enquête en Suisse, demander à Jérôme Cahuzac sa démission. La crise économique que vit la France le permettait-elle? Y aurait-il un obstacle lié au secret-défense?  Le surprenant est que Jérôme Cahuzac, médecin et chirurgien, homme d’affaires, après avoir quitté un département du Ministère de la santé qui fixait le prix des médicaments, ait créé un cabinet de conseils aux laboratoires pharmaceutiques. La loi le permet, l’étique et la probité l’interdisent. Sauf si l’homme a été choisi pour ces raisons. Une république irréprochable demeure un Etat ; son bon fonctionnement dépend de procédures complexes consacrant la raison d’Etat. Nous pouvons donc imaginer un François Hollande hésitant et indécis mais aussi, dans le contexte de guerre économique actuel, un chef de guerre et un Gouvernement astreints à des priorités, des silences et des inactions.

Selon le quotidien Le Monde « Le conseil de l'ordre du Grand Orient de France, première obédience maçonnique de France, a décidé de saisir en urgence vendredi 5 avril sa chambre suprême de justice,  en vue de suspendre Jérôme Cahuzac. Pour Libération, la procédure serait habituelle, «le GO souhaitant ne plus être mêlé aux affaires politico-financières : une mise en examen de l’un de ses membres, entraîne sa suspension...» On ne peut que se féliciter de cette position des francs-maçons puisque suspension ne veut pas dire exclusion. Nous pouvons comprendre que, présomption d’innocence oblige, Jérôme Cahuzac reste franc-maçon jusqu’à décision judicaire. Du fait du secret de l’instruction, un non-lieu, une relaxe ne sont pas exclus. Aussi, puisque la loi maintient Jérôme Cahuzac dans ses fonctions de député, il peut bien retoruner sur les bancs de l'Assemblée. Hurler avec les loups, aboyer avec les chiens, se nourrir avec les rapaces n’est pas du genre de ce magazine. Si quelqu’un connaît le précédent d’un ministre de la république qui se serait présenté spontanément aux enquêteurs pour dire la vérité, il sera pertinent qu’il utilise la zone de commentaires.

Qu’est-ce qui a poussé Jérôme Cahuzac à mentir? La question, au fil des jours, n’appelle plus réellement de réponse. Cela se comprend: peu de gens aimeraient qu’on leur demande la même chose. Ils seraient bien embarrassés de donner une réponse. Le lynchage médiatique a ses limites: on exécute le menteur mais il faut savoir s’arrêter avant de se faire repérer. Eh oui! Jérôme Cahuzac a menti, aussi, à des menteurs. Et il a un point d’avance sur eux tous: il a dit, lui, la vérité. Alors si les autres ont vociféré, ce n’est pas tant pour vendre leur politique que parce qu’ils n’ont pas eu le courage de Cahuzac: ils risquent encore, eux, une dénonciation. Nul doute que leur tour viendra. Le malheur est, dans cette affaire Cahuzac, que le menteur, en disant la vérité, a été exécuté. C’est bien cela qui fait qu’une république devienne inquisitoire.

Henri Vario-Nouioua



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