Faits Divers - Société
20/02/2008 13:26

Momies et squelettes posent des problèmes éthiques inédits à la science


Conservés dans les musées depuis des siècles, les squelettes, corps momifiés ou restes humains en bocal soulèvent ces dernières années des problèmes d'ordre éthique autrefois inconnus car la notion de la légitimité scientifique prédominait.



Pour les chercheurs, il s'agit "toujours de mettre à l'étude la diversité humaine dans son ensemble, toutes les populations du monde sans en exclure aucune", résume Alain Froment, du Musée de l'homme à Paris.

Mais depuis la demande de restituer à l'Afrique du Sud la "Vénus hottentote" Saartjie Baartman, conservée au Musée de l'Homme jusqu'en 2002, l'aspect éthique a pris le dessus sur les motivations scientifiques.

Dernier rebondissement, la bataille juridique déclenchée par la tête desséchée d'un guerrier maori, sortie en octobre dernier des collections du Muséum de Rouen pour être renvoyée en Nouvelle-Zélande. L'affaire demeure ouverte en raison de l'absence d'un déclassement officiel de cette "pièce" des collections publiques.

Le pauvre Maori a provoqué de telles émotions qu'il se retrouvera, vendredi et samedi prochains, au centre d'un symposium international ouvert au public, au Musée du quai Branly, à Paris.

Tout a commencé il y a une vingtaine d'années avec les revendications des peuples "indigènes", souhaitant récupérer les restes de leurs ancêtres. Les premiers à l'avoir fait sont les Amérindiens des Etats-Unis.

"Mais après avoir demandé les squelettes, note Alain Froment, les Amérindiens ont demandé les poteries, les objets de culte, les plumes, qualifiés d'objets sacrés. Les musées d'ethnologie se sont donc vidés également."

Question fondamentale, qu'est-ce qu'un reste humain par rapport à un objet de musée, "parce que ce n'est quand même pas un objet, mais une personne", ajoute l'anthropologue français.

"Un reste humain, ajoute-t-il, peut faire partie tant des collections anatomiques d'un musée que de celles d'un hôpital, y compris les prélèvements conservés sous forme de lames histologiques, de sérothèques, de plasma ou de l'ADN. En France, la loi de bioéthique (de 2004) a essayé de le codifier."

Par ailleurs, l'importance scientifique de ces restes peut apparaître longtemps après qu'ils ont été été collectés. Par exemple, la souche du virus à l'origine de la grande épidémie de grippe "espagnole", en 1918, a pu été trouvée dans des lames histologiques aux Etats-Unis. Ce genre d'"archives" a révélé aussi que le sida existait dans l'actuelle République démocratique du Congo dès les années 1950.

Le fameux homme nain préhistorique de Florès, découvert en 2003 en Indonésie, a été identifié grâce à l'étude comparative de son crâne avec la série de crânes microcéphales du Musée de l'Homme (dépendant du Muséum national d'histoire naturelle).

Quant aux problèmes éthiques, la politique du Musée, souligne M. Froment, part d'un principe simple: tant que la personne à l'origine d'un reste peut être identifiée, ses descendants sont fondés à le réclamer".

En revanche, lorsque les archives remontant à l'ère des voyages d'exploration ne permettent pas de le sortir de son anonymat, "nous ne voulons pas entrer dans une sorte de logique tribale, selon laquelle ce crâne venant de telle région, les aborigènes de cette région peuvent aussi le réclamer", insiste l'anthropologue.

"Notre base, conclut-il, c'est la science avec un grand S, apolitique et areligieuse mais non pas antireligieuse. Nous estimons que quelqu'un peut être utile à la société même après sa mort."

Yahoo.fr

M.D/sourcesWeb



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