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Allemagne: des grèves en série font sonner le glas de la paix sociale

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Les mouvements sociaux se multiplient en Allemagne, touchant mercredi pour la première fois les aéroports et confirmant l'effritement du modèle du consensus social dans un pays longtemps épargné par les grèves

Vols annulés ou retardés: pour la première fois depuis le début d'un conflit social sur les salaires qui a démarré à la mi-février, l'Allemagne a connu mercredi le chaos dans ses grands aéroports de Francfort (ouest), de Munich (sud) et de Düsseldorf (ouest).

A l'appel du syndicat des services Verdi et du syndicat de la police GdP, les aéroports de Stuttgart (sud-ouest) et Hambourg (nord) étaient également touchés, de même que celui de Hanovre (nord), où se tient cette semaine la plus grande foire mondiale des technologies, le Cebit.

Chaos aussi dans les services publics: les bus et les trains régionaux sont restés au dépôt, les hôpitaux ont fonctionné au ralenti, des centaines de crèches, des caisses d'épargne et diverses administrations publiques sont restées portes closes.

Même le syndicat GdL des conducteurs de trains, qui avait donné le la à d'autres mouvements sociaux en paralysant l'Allemagne l'an dernier, a menacé de reprendre de plus belle son mouvement de grève.

La Rhénanie-du-nord-Westphalie, l'Etat le plus peuplé d'Allemagne qui abrite les villes de Düsseldorf et Cologne, était la plus affectée, avec 67.000 grévistes attendus par Verdi dans la journée.

A Berlin, la capitale, outre le ramassage des ordures, les salariés de la société de transport en commun BVG ont entamé une grève qu'ils veulent mener jusqu'au 14 mars.

Verdi négocie depuis début janvier avec l'Etat fédéral, les Länder et les communes un accord salarial pour 1,3 million de salariés de la fonction publique. Le syndicat réclame 8% de hausses de salaires, le camp des employeurs propose pour le moment 4% et une augmentation du temps de travail.

D'après une étude de la fondation Hans-Böckler, proche des syndicats, les salariés n'ont pas bénéficié de la reprise économique qui a démarré fin 2004. Au contraire, les salaires réels ont baissé de 3,5%.

La démonstration de force de Verdi est un phénomène rarissime dans un pays où les conflits sociaux, concentrés surtout dans l'industrie, se règlent habituellement à la table des négociations et non pas dans la rue.

Une cinquième journée de négociations avec les employeurs, est prévue jeudi à Potsdam (est). Que l'appel à la grève d'avertissement ait été lancé à ce stade précoce des négociations semble aussi inhabituel.

Verdi, un des plus grands syndicats européens, craint de perdre des adhérents. Déjà plusieurs corps de métier, dont les pilotes et les médecins, se sont détachés de cette confédération pour défendre eux-mêmes leurs intérêts avec succès à l'issue de durs mouvements sociaux. "C'est la raison pour laquelle Verdi mène une action plus agressive", explique à l'AFP le professeur Hagen Lesch de l'institut économique IW de Cologne (ouest), proche des employeurs.

Pour le syndicat, les grèves d'avertissement ont aussi le caractère d'"une action de marketing" pour recruter de nouveaux membres, a-t-il ajouté.

Le contexte actuel --du scandale de fraude fiscale vers le Liechtenstein au débat sur l'éthique des dirigeants d'entreprises, déjà attaqués ces derniers temps pour leurs rémunérations mirobolantes-- lui est propice.

Tous ces mouvements sociaux connaissent "une hausse drastique depuis deux ans", selon M. Lesch. En 2007, l'Allemagne a enregistré 580.000 journées non travaillées du fait des grèves, contre 428.739 en 2006 et 18.633 en 2005, selon l'IW.

Parallèlement, le parti de gauche, Die Linke, qui fait campagne contre les injustices sociales, progresse continuellement. Après l'élection régionale dans la ville-Etat de Hambourg le 24 février, il siège désormais dans les parlements de dix des 16 Etats fédérés.


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