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Brésil : Haro sur les enseignant.e.s marxistes !

Perspective communiste

Comment des "mouvements citoyens", tous pilotés par les droites brésiliennes, mènent une purge du corps enseignant dit "marxiste" au profit d’enseignant.e.s "apolitiques" c'est à dire compatibles avec le néolibéralisme et la société capitaliste - un article du Monde Diplomatique

En 2016, un mouvement d’occupation des lycées exigeant plus de moyens pour l’éducation polarise le pays. Il touchera jusqu’à mille établissements au mois d’octobre. Soutenu par les syndicats et les formations politiques de gauche, il est rapidement présenté par la droite comme l’illustration de l’« infiltration de l’idéologie marxiste » (selon le sénateur Ronaldo Caiado) dans les écoles.

Les organisations dites « citoyennes » opposées au Parti des travailleurs (PT), alors au pouvoir, et leurs représentants politiques ressortent des cartons une proposition de loi de 2004 intitulée « L’école sans partis ». Ce projet, qui entend lutter contre les « abus de la liberté d’enseigner », consiste à apposer dans chaque salle de classe du Brésil une plaque (de 90 centimètres de haut sur 70 de large) décrivant les « devoirs du professeur », avec un numéro de téléphone gratuit et anonyme pour que les élèves puissent dénoncer les enseignants qui chercheraient à les « endoctriner » (sur les questions politiques, religieuses ou liées à l’orientation sexuelle).

Bien que la Cour suprême ait déclaré ce projet de loi inconstitutionnel, le texte est à nouveau présenté à la Chambre des députés à Brasília, ainsi que dans huit États et dix villes. Il n’a force de loi nulle part (sauf dans l’Alagoas, en dépit de son inconstitutionnalité), néanmoins plusieurs professeurs ont été sanctionnés par leurs supérieurs — quand ce ne sont pas les parents ou les élèves qui les ont « dénoncés » aux militants conservateurs.

Le conseiller municipal de Saõ Paulo Fernando Holiday, l’une des figures du Mouvement Brésil libre (MBL), s’est soucié de vérifier si des enseignants « endoctrinaient les élèves avec des idées marxistes », comme il l’explique en nous exposant son projet. Ses « visites-surprises » dans les écoles, filmées et diffusées sur les réseaux sociaux, ont été interrompues à la suite d’une plainte déposée par un député de gauche de São Paulo, M. Carlos Giannazi. «

Non seulement il ne lui revient pas de contrôler les enseignants, mais en plus il invente des professeurs marxistes dans le but de provoquer une chasse aux sorcières qui peut être dangereuse », nous explique-t-il. Le 21 août, dans la ville d’Indaial (État de Santa Catarina), la professeure Marcia Friggi a été molestée par un de ses élèves. Son visage ensanglanté a choqué le pays. Mais, sur les réseaux sociaux, certains considèrent que « l’élève n’a pas tapé assez fort sur cette gauchiste ».

Anne Vigna
Le Monde diplomatique


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