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Carnet de route – impressions de Cuba (première partie)

Nicolas Maury

Les calomniateurs n'auront qu'a bien se tenir, la vérité sur Cuba sera dévoilée. Vrai pays libre, vrai démocratie rien à voir avec la France de Sarkozy, rien a voir avec l'Europe des banques, rien à voir avec le monde de la mondialisation capitaliste. VIVA CUBA SOCIALISTA

Voyager à Cuba pour un militant communiste semble être normal et pourtant c'est assez difficile. La peur de la déception peut pousser a mal interpréter les éléments du pays, en effet l'adulation qu'il existait pour les ex-pays socialistes ont faussé notre imaginaire. C'est sans qualificatifs hagiographiques que commence mon voyage de solidarité vers Cuba, qu'elle est la nature du socialisme cubain ? Les racontars des médias occidentaux sur Cuba sont-ils justes ? Dictature au soleil ? Nous le verrons, beaucoup de choses sont surprenante là bas.

Le contexte est important, le voyage se déroule pour les 50 ans du triomphe de la Révolution de 1959 et pour la fête nationale du 26 juillet.


Carnet de route – impressions de Cuba (première partie)
Le point de départ de la révolution cubaine est le 26 juillet 1953, lorsqu'une centaine de guerilleros, mal armés, ont attaqué la Caserne de Moncada. Bon nombre d'entre eux furent tués mais certains comme Fidel Castro et son frère Raúl Castro furent capturés peu de temps après. Fidel Castro fait de son procès une tribune politique et parlera pendant près de quatre heures pour assurer sa défense. Il finira par ces mots : « peu importe que je sois condamné, l'Histoire m'affranchira ». Il est condamné à 15 ans de prison sur l'Île de la Jeunesse. Son frère est également condamné à 13 ans de prison.

En 1955, en raison de la pression de personnalités civiles, de l'opposition générale, et des jésuites qui avaient participé à l'instruction de Fidel Castro, Batista décide de libérer tous les prisonniers politiques, y compris les attaquants de Moncada. Les frères Castro partent en exil au Mexique, où se retrouvent tous les cubains décidés à renverser la dictature de Batista par la révolution cubaine. Pendant cette période, Castro a également rencontré Ernesto « Che » Guevara, qui a joint leurs forces. Ils sont entraînés par Alberto Bayo, un ancien chef militaire des républicains espagnols exilé au Mexique à la fin de la guerre civile espagnole.

Le groupe se forme à la guérilla sous la conduite de Fidel Castro et revient à Cuba en novembre 1956, sur un petit yacht appelé Granma. Ils ont espéré que leur débarquement au Cuba oriental coïnciderait avec les soulèvements prévus dans les villes et une grève générale coordonnées par le mouvement du 26 juillet. L'objectif était de mener une offensive armée et de renverser le régime de Batista.


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I - Contexte général de Cuba

A) Géographie

Cuba est officiellement une République socialiste dont l'appellation est « Republica de Cuba ». L'île est un pays d'Amérique centrale formé de l'île de Cuba (la plus grande île des grandes Antilles), de l'île aux Pins (appelée île de la Jeunesse depuis 1976) et de quelques autres petites îles. Il est situé, au nord des Antilles, à la confluence de la mer des Caraïbes, du golfe du Mexique et de l'océan Atlantique ; au sud de la côte est des États-Unis et des Bahamas ; à l'est du Mexique et à l'ouest des îles Turques et Caïques ; au nord des Îles Caïmans et de la Jamaïque. Derrière Hispaniola, Cuba est la deuxième île la plus peuplée des Caraïbes avec 11 300 000 habitants. Sa capitale est La Havane, sa langue officielle l'espagnol et deux monnaies y sont utilisées : le peso cubain et le peso cubain convertible. L'île a été une colonie espagnole de 1492 à 1898. Depuis 1959, Cuba est une république socialiste.


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B) Deux monnaies pour un même pays

Une chose assez surprenante à Cuba c'est l'existence de deux monnaies: le Pesos (pesos cubanos ) et le pesos convertible (cuc). La création du cuc remonte à 2002 pour récupérer le maximum de devises en particulier en provenance du tourisme. Une taxe de 15 % est imposée pour changer les dollars US (anti-impérialisme oblige). Si le change avec l'euro est variable quoique oscillant autour de 1, 20 CUC pour un euro, le change du CUC au peso cubano est fixe à 24 pesos pour 1 CUC. Avec le pesos cubain la majorité de la population de l'île bénéficie des prix subventionné par l'Etat notamment dans les domaines agroalimentaires. Avec le cuc les prix sont plus cher, un soda va coûter 80 centimes d'euros (1 cuc) là ou dans un bar français il va coûter 2,5 euros (3 cuc). Bref la vie reste moins chère à Cuba qu'en France.


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Produits
Coût en France (1 euros = 1,2 cuc)
Coût à Cuba (1 cuc = 0,8 euros)
Un soda (en terrasse de bar)
2,5 euros (3 cuc)
1 cuc (0,80 euros)
Tabac (européen et US)
5 euros (6 cuc)
2,5 cuc (2 euros)
Rhum 3 ans d'âge
15 euros (18 cuc)
3,95 cuc (3 euros)
Trajet en bus
2 euros (2,4 cuc)
0,05 cuc (0,04 euros)


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C) Un pays sous le blocus des Etats-Unis depuis près de 50 ans

Le blocus mis en place le 7 février 1962 à la suite de nationalisations expropriant des compagnies américaines a coûté très cher à l'île, il est estimé à 95 milliards de dollars US. En 2009, l'embargo est officiellement toujours en place, ce qui en fait le plus long embargo commercial de l'histoire moderne.

La réglementation de contrôle sur les actifs cubains (Cuban Assets Control Regulations) impose des restrictions sur les importations et les exportations entre Cuba et les États-Unis (cadeaux en nature ou en argent inclus) et sur les autres transactions avec Cuba ou avec des ressortissants cubains. Elle impose un gel total des actifs cubains et des transactions financières entre l'île et les États-Unis. Elle restreint enfin le voyage vers Cuba. En 2004, les restrictions sont toujours en place et sont mises en œuvre par le Service de contrôle des actifs étrangers du Trésor (Office of Foreign Assets Control). Des peines de prison d'au plus dix années de réclusion sont prévues en cas de non respect de l'embargo et l'amende peut atteindre un million de dollars pour les entreprises et 250 000 dollars pour les particuliers.


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Néanmoins, l'embargo a eu un effet limité sur Cuba durant les premières décennies car l'île bénéficiait du soutien de l'Union soviétique et des pays du CAEM qui lui fournissaient carburant, biens de consommation et subventions en échange de sucre et de nickel. Pour la seule année 1980, Cuba reçut environ 6 milliards. Cuba avait aussi accès aux marchés des pays soviétiques pour exporter ses produits (principalement le sucre et le nickel).

La chute de l'Union soviétique et du COMECON qui priva l'île de ses principaux partenaires commerciaux et l'embargo des États-Unis eurent de lourdes conséquences sur l'économie cubaine. L'économie cubaine dépendait de l'aide et des débouchés du COMECON. L'Union soviétique achetait le sucre cubain à un prix supérieur au prix du marché et fournissait du pétrole à bas prix. En 1992, le niveau des échanges avec les pays de l'ex-COMECON représentait moins de 7% du niveau de 1989. Dans le même temps, le PNB cubain chuta de plus de 35%, les revenus par habitant de 39%. Sans pétrole et par manque de matériel, l'agriculture cubaine fut décimée ; les coupures de courant étaient fréquentes, la faim et la sous-alimentation étaient répandues.

C'est ce que l'on nomme la "période spéciale". Un rapport fait par un médecin français vers 1994 décrivait un système où l’acupuncture remplaçait les anesthésies, où de nombreuses opérations devaient être annulées faute de matériel stérile. La prostitution refaisait surface, rappelant amèrement Cuba son ancienne réputation de « Bordel de l’Amérique » - mais l’île a largement été détrônée sur ce point par d’autres états, comme le Mexique, sans compter la concurrence sud-asiatique). La chute du régime semblait imminente.

Sans le blocus, Cuba pourrait recevoir un nombre nettement plus grand de touristes, nombre estimé à 3 millions de touristes annuels en plus. Le travail à l’étranger serait également une plus grande manne de revenus pour le peuple cubain : contrairement à ce qui est souvent cru à l’étranger, ce n’est pas tant Cuba qui refuse l’émigration que les états nord-américains ou européens qui imposent des visas en nombre très réduit. Ainsi, il est plus facile de faire venir 100 français à Cuba qu’un seul cubain sans raisons familiales ou professionnelles particulières en France.


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D) ALBA - Alternative bolivarienne pour les Amériques

L'ALBA et la venue d'Hugo Chavez ont eut des conséquences positives sur le plan politique et économique. L'Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA) (Alternativa Bolivariana para los Pueblos de Nuestra América en espagnol) est une organisation politique, sociale et économique pour promouvoir la coopération dans ces domaines des pays de l'Amérique latine et des Caraïbes. D'abord évoquée par Hugo Chávez, président du Venezuela, lors d'un sommet, en décembre 2001, des chefs d'Etat de la Communauté des Caraïbes, l'ALBA a été officiellement lancée en avril 2005, par la signature d'un « traité commercial des peuples » entre Cuba et le Venezuela. La Bolivie, le Nicaragua, la Dominique et le Honduras se sont depuis associés à l'initiative, qui visait d'abord à promouvoir une alternative à la ZLEA (Zone de libre-échange des Amériques) promue par Washington. Saint Vincent et les Grenadines en est devenu membre le 17 avril 2009. Enfin, en juin 2009, le nombre de membres passe à neuf, suite à l'adhésion d'Antigua-et-Barbuda et de l'Équateur.


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Elle a été pour la première fois évoquée par le président Chávez lors du 3ème sommet des chefs d’Etat de la Communauté des Caraïbes (Caricom), en décembre 2001, comme alternative à la Zone de libre-échange des Amériques promue par les États-Unis.

Sur le plan économique, l'ALBA vise à favoriser la logique coopérative, plutôt que la création d'une zone de libre-échange avec les Etats-Unis qui passe par un abaissement des droits de douanes, voire leur suppression. Elle s'oppose ainsi directement au « consensus de Washington » qui prônait dans les années 1990 la déréglementation et la mise en place de mesures néolibérales. Plutôt que d'ordonner des privatisations, l'ALBA favorise au contraire le secteur public.

Cuba a déjà passé des accords de coopérationavec le Vénézuela : ce dernier livre du pétrole à un tarif préférentiel en échange de l'envoi de médecins par Cuba. Et avec l'ALBA Cuba envoie des instituteurs dans les pays d'Amérique latine, ces derniers ont réussit a éradiquer l'analphabetisme au Vénézuéla et en Bolivie.

Carnet de route – impressions de Cuba (première partie)

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Coming soon : II – Les premières impressions, ce que la vue raconte -> ICI


Commentaires (6)
1. caroleone le 07/08/2009 12:28
Bonjour Nicolas,

Alors là, bravo, ça fait plaisir ce compte rendu qui aura le mérite de dévoiler la vérité sur Cuba. Tellement de choses sont dites et déformées sur cette île pour peu que le touriste soit communiste ou pas, plusieurs versions s'expriment, à croire qu'il y a 2 cuba !!
Je te pique ton résumé afin qu'il figure sur mon blog comme référence et également la suite..car je crois que tu as une suite en préparation ?
Je te félicite, tu as fait un très beau travail. J'espère un jour pouvoir me rendre à Cuba, mais ma priorité reste le Mexique ( je ne voyage pas, alors il faudra être sélectif). Comme je suis passionnée par l'Amérique latine et ses peuples, le choix serait difficile !!

A plus
2. Nicolas le 07/08/2009 13:38
Oui la suite est prévue (déjà rédigée) est va porter sur ce que la "vue" distingue, sur le "paraître" qui parle aussi bien que des chiffres. Cette partie est surtout beaucoup plus militante car elle va couper court a certaines rumeurs et tacler les zigotos qui disent "ouais mais Cuba j'étais trop pour, le Che et tout, mais maintenant je suis trop rebelle alors non" -> le gaucho bobo de base type NPA.

Cuba vaut au moins le déplacement, 15 jours c'est court mais c'est déjà une bonne approche pour comprendre la complexité de l'île, car ce n'est pas simple a comprendre. Il m'a fallu une semaine là bas pour enfin me dire: ILS ONT TOUT COMPRIS !!!!

A bientôt et bonne lecture
3. jeanyves urvoy le 10/01/2010 13:52
Cher Nicolas,

décidément, on peut encore voyager aveuglément à Cuba en 2009. J'y habite depuis 2006, et ce que tu racontes ne correspond en rien à ce que souffre le peuple depuis 50 ans. Es-tu seulement sorti de la Havane et des circuits proposés par les militants cubains ? j'en doute, c'est dommage, pire scandaleux au vu des souffrances de tout un peuple.

Jean Yves +p

PS je te signale que j'ai pu surfer sur internet à la faveur d'un séjour dans le monde libre... à Cuba pas d'accès pour le peuple !!!
4. Nicolas Maury le 11/01/2010 00:02
C'est vrai que l'envoi de prêtres a Cuba c'est un super travail, c'est violent comme travail surtout à Santa Clara. Aller ramasser des patates douces à Batabano (si ma géographie est bonne c'est loin de la Havane) c'est a mon sens bien plus physique et rude que dire la messe, n'est-ce pas monsieur l'Abbé ?

Pourquoi un envoi de prêtre ? pour tenter de saper les fondations de la révolution comme en Pologne ? désolé Mr l'Abbé je suis un anticlérical primaire qui ne pardonne pas à l'Eglise et ses textes fondateurs les catastrophes qu'a du subir le monde au nom d'un dieu soi disant tout puissant. Oui je suis un mécréant païen et Charlemagne n'a pas pu me convertir comme il a massacré les saxons au nom du christ.

Je suis gentils je passe sur l'épisode (les 9 épisodes) des croisades, de l'inquisition, des chasses aux sorcières, des guerres de religions, des dragonnades de Louis XIV etc.

Amitiés d'un hussard noir de la République
5. jeanyves urvoy le 15/01/2010 15:11
cher Nicolas,

on ne peut s'empêcher d'avoir des réactions primaires et des à priori mais il est bon aussi de les dépasser :
dans l'emploi du temps d'un prêtre au quotidien, la célébration de la messe(qui est la source et le centre de sa vie car on y rencontre le Dieu vivant et aimant) n'occupe que 5 % de son activité apostolique : je travaille aussi à soulager pas mal de misères physiques, économiques et spirituelles, et si tu viens passer qq jours chez nous, tu verras que c'est aux antipodes de tes préjugés.
sois assuré de ma prière, de la part d'un prêtre croyant et aussi mécréant (mauvais croyant car infidèle par mes péchés au Dieu fidèle et vrai).

JYU +p
6. Morin le 21/08/2011 11:04
C'est un beau reportage photos. Bravo
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