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Fin de grève victorieuse en Martinique

Nicolas Maury

L’île est officiellement sortie samedi d’un mouvement social historique avec la signature unanime d’un protocole d’accord global, au 38è jour de grève

Au 38e jour de mobilisation menée par le "Collectif du 5 février", ce document signifie la levée du mot d’ordre de grève.

Le Collectif "se réserve le droit de repartir en grève si les accords signés ne sont pas respectés ou que les négociations entamées traînent en longueur", a précisé à l’AFP Michel Monrose, son président.

Le protocole de sortie de crise acte en effet la vingtaine d’accords déjà aboutis (salaires, prix, banques, assurances, etc.) mais liste aussi les sujets encore en négociation (agriculture, environnement, minimas sociaux, matériaux de construction, etc.).

Outre les différentes composantes du Collectif, les organisations patronales et socio-professionnelles, les collectivités territoriales (région, département, communes), les parlementaires et les représentants de l’Etat ont signé ce document inédit.

Dans la rue et sous les fenêtres de la préfecture où se déroulait cette réunion plénière empreinte de solennité, des milliers de manifestants arborant le T-shirt rouge du Collectif chantaient "Matinik lévé" (Martinique debout, en créole) entraînés par les tambours.

Entre 7.000 personnes (police) et 15.000 (organisateurs) ont fait le tour de la ville pour accompagner, comme cela en était devenu l’habitude, les membres du Collectif.

Juste avant que les parapheurs circulent, l’allocution de M. Morose a été chaudement applaudie par les dizaines de membres du Collectif présents dans la salle qui ont repris en choeur "Matinik lévé", tandis que les représentants du patronat qui leur faisait face se levaient à leur tour, la mine grave, à l’exception du président du Medef local, Patrick Lecurieux-Durival, qui retient seulement qu’il "ne pouvait s’associer à un mouvement qui a détruit une bonne partie des capacités économiques" de l’île. 800 dossiers de demande de chômage partiel ont été déposés, sans pouvoir distinguer là-dedans le rôle de la crise mondiale des effets du mouvement qui a duré 38 jours parce que c’est le temps qu’il a fallu au patronat pour prendre la mseure du mouvement.

Pour Alexandre Richol, président de la CGPME, "c’est l’aboutissement d’un mois de discussions et le début de beaucoup de chantiers". Au contraire du Medef, il juge que l’ "on ne peut plus voir l’entreprise comme une entité qui doit exclusivement dégager des profits mais aussi prendre en compte sa dimension sociale".

Les cinq semaines ont été émaillé de deux poussées de violence (24-25 février et 6 mars) qui n’ont fait que des blessés légers. Et si la Martinique a été placée en "situation de crise majeure en matière sanitaire et sociale", la réponse d’urgence et les compromis trouvés avec le Collectif ont permis d’éviter toute catastrophe.

Les principaux points du protocole de sortie de crise en Martinique

Le protocole de sortie de crise, signé samedi en Martinique, acte les accords déjà obtenus lors des 37 jours de négociations depuis le début de la grève le 5 février et liste les sujets encore en discussion.

Sur les 323 revendications du Collectif, on dénombre "236 points d’accord" (130 faisant l’objet d’un accord immédiat, 106 faisant l’objet d’un accord à court terme nécessitant des modifications réglementaires et législatives) et "87 points faisant l’objet d’un examen complémentaire", selon les termes du document.

L’ensemble des points fera l’objet d’un suivi dans le cadre de comités thématiques. Les conclusions de ces comités de suivi seront rendues publiques tous les trimestres dans le cadre des réunions du comité de suivi général.

Principaux accords :

- salaires : une prime de 200 euros nets pour les salariés du privé gagnant jusqu’à 1,4 smic (47.000 personnes soit plus de 60% des salariés du privé), et des augmentations de salaires pour ceux entre 1,4 et 1,6 smic (+4%, 8.400 salariés), et ceux au-delà de 1,6 smic (+2%, 22.000 salariés). Cet accord est applicable à compter du 1er mars.

- prix : baisse de 20% des prix de 400 articles de première nécessité (riz, pâtes, beurre, couches pour bébé, etc) pour les magasins de la grande distribution classique et de 102 produits pour les magasins Leader Price.

- santé-social : investissement, création de places pour personnes âgées et handicapées, échéancier de titularisations dans les hôpitaux, plan de création de places dans l’hébergement d’urgence et extension des 200 euros aux agents non titulaires.

- agents territoriaux : extension de l’accord sur les salaires aux agents non titulaires et disposant d’un contrat de droit privé.

- banques : nouvelles tarifications des services bancaires, avec des offres en direction de la clientèle à faibles ressources, des consolidations de crédits à taux préférentiels.

- logement social : baisse de 50 euros du forfait des charges dû par les locataires

- éducation : blocage des postes de remplaçants pour les réserver à des personnels locaux

Quelques sujets en discussion ou qui vont être discutés dans le cadre d’un calendrier de réunions prévues initialement juqu’au 27 mars :

- baisse des prix des pièces détachées automobiles

- baisse des prix des matériaux de construction

- "intrants en agriculture" : engrais, produits phytosanitaires, semences, aliments pour animaux, matériels de conditionnement, etc.

- minimas sociaux et retraites

- prix et services de la téléphonie

- prix de l’eau


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