Perspective Com
L’entrée en lutte des salariés du privé pour... gagner plus !

Nicolas Maury

Travailler plus, ils le font déjà. Les salariés français sont les premiers au hit-parade européen de la productivité horaire. Gagner plus, ils le réclament désormais de plus en plus fort, eux qui gagnent à peine le SMIC ou moins de 1400 euros comme c’est le cas de la moitié des salariés du pays

Neuf mois après l’élection de celui qui osait se présenter comme le « président du pouvoir d’achat » dans des discours citant pêle-mêle Jaures et Blum, les mêmes font une amère expérience : les seules mesures prises immédiatement après le renouvellement d’une majorité de droite à l’Assemblée furent prises au profit des plus riches de ce pays.

Les salariés au pouvoir d’achat étranglé par les bas salaires et l’explosion de la rente immobilière n’ont le droit à rien ou pire pour certains d’entre eux qu’à la fermeture de leur usine. Ford à Blanquefort, Kleber à Toul, Arcelor-Mittal à Gandrange, Miko à St-Dizier, ce sont là des noms d’usines, de multinationales, de villes qui croisent la question du pouvoir d’achat, de l’avenir industriel du pays et du rôle des pouvoirs publics, locaux et nationaux.

Sur ce dernier point, le chef de l’Etat qui se veut le champion des usines françaises a surtout démontré qu’il était là encore celui de la défense des actionnaires contre les salariés. Ces derniers concourent aux bénéfices records des groupes du CAC 40 et pour, comme c’est le cas à Gandrange, permettre à un groupe comme Arcelor-Mittal de distribuer un tiers des sept milliards d’euros obtenus en 2007, l’emploi de centaines de familles peut être sacrifié.

Hormis de pieuses déclarations, que propose ce gouvernement ? Une « veille permanente », comme l’a redit la ministre de l’Economie, pour observer « quels pans industriels vont se créer et lesquels vont disparaître ». La belle affaire ! Et puis cela ne mange pas de pain, le souhait « d’améliorer la compétitivité de la France, aider les entreprises à être plus productives, les salariés à être mieux formés, plus adaptés aux évolutions de l’économie ». Ces mots, ressassés depuis des lustres, font de moins en moins illusion auprès de celles et ceux qui paient la « compétitivité » aux prix fort, de la précarité, des bas salaires, de la vie en miettes et ne voient rien venir en retour. Cette réalité insupportable vient se telescoper à d’autres chiffres qui ne demandent qu’à prendre encore plus sens. Les 500 plus grandes fortunes professionnelles cumulent à elles seules 280 milliards d’euros. N’y a-t-il pas là terrain à une autre fiscalité intégrant des critères de justice et d’efficacité sociale ?

Il est une « rupture » décisive qui pourrait être engagée avec une réalité prégnante depuis plus de vingt ans : alors que les richesses produites explosent, les bénéfices des « stars » du CAC 40 en attestent, la part des salaires elle a regressé et stagne désormais. La compétitivité est là mais elle est gangrenée par le cancer financier. Le pire est que celui-ci peut encore prospérer grâce à la crise boursière actuelle : les fonds spéculatifs, les LBO à l’origine des rachats puis liquidations de nombre de petites et moyennes entreprises, vont pouvoir élargir leurs prédations grâce à la baisse des cours. Quel est le rôle de l’Etat : « observer » la concurrence libre et non faussée ou mettre en place des outils contraignants, en matière de crédit, d’impôts ou de formation ?

Le fait nouveau de ce début d’année, qui coïncide avec un rendez vous électoral, est que désormais il faut compter avec la voix des salariés du privé qui commence à s’élever et trouve désormais un écho national. Cela ne peut que contribuer à rouvrir la tenaille dans laquelle MEDEF et gouvernement veulent enfermer les syndicats pour les affaiblir et accélérer les « réformes » antisociales portées par Sarkozy. Ce dernier a du faire marche arrière sur son implication dans la campagne électorale. Avec le logement, le pouvoir d’achat et l’emploi viennent de faire irruption dans le débat.


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