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La face cachée du nouvel impôt plancher

Nicolas Maury

Bercy veut récupérer la mise du bouclier fiscal en soumettant les classes populaires à une imposition minimum.


La face cachée du nouvel impôt plancher
Le gouvernement Fillon peut-il récupérer, sans toucher aux plus riches, la plus grosse partie des 45 milliards d’euros d’impôts annuels qui ne rentrent pas dans les caisses de l’État en raison de l’existence des diverses déductions légales ? Les services de Bercy travaillent sur la question. Selon les propos du député centriste Charles-Amédée de Courson, rapportés par le Canard enchaîné, « le principe est acquis. Reste à en fixer les modalités ». De son côté, le ministère des Finances affirme que « toute déclaration à ce sujet est prématurée ». Mais le Canard enchaîné précise que Christine Lagarde est favorable au principe d’un impôt plancher et qu’elle rendra publique le 15 octobre la décision de l’Élysée sous la forme d’un rapport au Parlement.

L’idée de Bercy consiste à fixer un impôt plancher pour les contribuables qui déduisent de leur revenu imposable différentes exonérations votées par le Parlement au fil des ans. Parmi ces déductions figurent entre autres le salaire de l’employée de maison ou de la nourrice, les abattements pour travaux en faveur des économies d’énergie, etc.

Dans cet empilement de déductions, les plus importantes vont aux ménages qui ont investi dans des appartements locatifs en profitant successivement des dispositifs Périssol, Besson, de Robien et Borloo, ces ministres du Logement qui se sont succédé depuis 1995. Ainsi le dispositif Périssol étale les déductions fiscales sur une vingtaine d’années et permet de récupérer 80 % de la valeur initiale d’un bien dont la valeur aura parallèlement doublé en monnaie constante durant les mêmes années !

Député socialiste des Landes, Henri Emmanuelli avait expliqué devant ses collègues le 18 octobre 2006 qu’il ne payait que 168 euros d’impôts au lieu de 11 000 euros. Il lui suffisait d’additionner les déductions autorisées pour le salaire de la femme de ménage, celles relatives à ses cotisations au Parti et au groupe socialiste, celles concernant un don en faveur d’un centre d’insertion de handicapés pour parvenir à ce résultat.

Cette démonstration a-t-elle convaincu les membres de la commission des Finances que sont Pierre Méhaignerie, Gilles Carrez, Charles-Amédée de Courson et le président socialiste Didier Migaud ? C’est possible. Mais les fins limiers de la commission des Finances ont volontairement oublié un aspect de la question. Après la mise en place du bouclier fiscal qui limite les prélèvements à 50 % du revenu de l’année, la création d’un plancher fiscal n’aura que des conséquences minimes pour les titulaires de grandes fortunes et de très hauts revenus annuels. Ils gagnaient bien trop pour s’approcher de l’impôt zéro en dépit de toutes les ficelles utilisées à cet effet. En revanche, ce plancher permettra de reprendre d’une main tout ou partie de ce que l’on aura donné de l’autre aux nouveaux accédants à la propriété qui vont bénéficier de la promesse électorale du président Sarkozy. Mais comme la prochaine élection n’a lieu que dans cinq ans…


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