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Logement : 100 000 décisions d’expulsion par an

Nicolas Maury

La pratique des expulsions locatives est d’une totale inhumanité. Plus de 30 associations, des syndicats se mobilisent régulièrement pour obtenir l’arrêt des expulsions. Le groupe communiste au Sénat a déposé dans le même but un projet de loi. La commission des droits de l’homme de l’ONU considère les expulsions forcées comme des violations des droits de l’homme. Le programme ONU habitat vient de nommer une élue, la maire communiste de Bobigny, Catherine Peyge, comme expert sur la question des évictions et des expulsions

Car Bobigny, depuis des années, s’y oppose, comme d’autres maires dans d’autres villes. Mais alors que leur action est reconnue sur le plan international, en France, ils sont poursuivis. Les droits de l’homme au pays qui les a pensés et écrits sont-ils une donnée relative ?

La loi sur le droit opposable au logement a été vantée par le gouvernement, par la ministre Christine Boutin, comme une avancée extraordinaire. Comment peut-on continuer alors à expulser des locataires en difficulté ? D’après les chiffres de la Fondation Abbé Pierre, chaque année plus de 100 000 décisions d’expulsion sont prises, près de la moitié sont assorties d’un commandement de quitter les lieux, plus de 20 000 autorisent le recours à la force publique aux fins de les exécuter. 10 000 expulsions réelles au total ont lieu. Une sur dix ? Mais combien de drames, combien d’enfants effarés et de parents désespérés se retrouvant du jour au lendemain à la rue...

Les défenseurs de la loi et de l’ordre argumentent. Il y a des recours, on donne aux locataires des délais, on essaie même de les aider, ils ne sont pas tous de bonne foi... Certes. Mais on sait depuis longtemps que l’étau des fins de mois difficiles, l’angoisse de ne pas pouvoir y arriver conduisent le plus souvent au repli quand ce n’est pas à la honte, interdisent de se confier même aux proches.

Car ce sont ceux que la loi devrait protéger que la loi rend coupables.

Coupables d’être chômeurs, et bien heureux s’ils obtiennent un semblant de salaire avec un RSA et à la condition d’être méritants et persévérants dans un sous emploi. Coupables d’être malades, de creuser les comptes de la Sécu et astreints par conséquent aux franchises médicales, au forfait.

Coupables de leur surendettement quand ils se débattent pour s’en sortir et pour tenter de vivre simplement avec quelques loisirs, quelques vacances, des jouets pour les enfants.

Coupables de ne pas payer rubis sur l’ongle leur loyer quand l’immobiliser malgré la crise continue de faire le beurre des possédants, quand le logement social est toujours en panne dans des milliers de villes et que les récentes mesures gouvernementales ne peuvent qu’aggraver la situation des plus modestes. On sait comment ça dérape quand un loyer est en retard puis deux...

La ministre de l’économie Lagarde avait demandé il y a quelque temps devant le Parlement que l’on cesse dans ce pays de culpabiliser la richesse des riches ! Quelle sollicitude ! Ce qu’elle n’a pas dit, c’est que cette politique accule comme jamais les pauvres.


Commentaires (2)
1. Tourtaux Jacques le 17/09/2008 21:13
Les expulsions locatives sont inadmissibles, c'est monstrueux de permettre des abominations pareilles. Je ne vais pas revenir sur le drame d'Istres mais ce fut bien le point culminant d'un long calvaire provoqué par une société sans repères où tout fout le camp et où des propriétaires véreux abusent et profitent de la misère qu'engendre la société capitaliste.

L'ONU condamne les expulsions alors qu'en France, pays des droits de l'homme, ces mises à la rue sont reconnues et autorisées.

Dans quelle espèce de pays vivons-nous pour laisser faire de telles injustices ?
Jacques Tourtaux





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