Perspective Com
Nicolas Sarkozy : le charme est rompu

Nicolas Maury (source www.tdg.ch)

La cote du président s’effrite, 48% des Français lui font confiance, contre 55% en décembre et 65% en juillet dernier. L’argent, les hôtels luxueux,les avions privés, les stars sortant avec les stars déconcertent une partie de l’électorat. Le premier ministre François Fillon voit lui aussi sa cote baisser

Nicolas Sarkozy : le charme est rompu
Tous les spécialistes le disent : Nicolas Sarkozy est un fêlé de sondages. Il les décrypte avec une science de politologue et n’hésite jamais à brandir cette formule définitive : « Comme les sondages le prouvent. » La dernière enquête de l’institut CSA ne devrait pourtant pas lui plaire. Publiée hier par le Parisien, elle révèle une baisse brutale de la popularité du président. 48% des Français lui font confiance, contre 55% en décembre et 65% en juillet dernier.

Ce baromètre mensuel a été réalisé les 2 et 3 janvier. Les Français n’avaient pas encore sous les yeux les clichés colorés du séjour de Sarkozy et de son « amie » Carla Bruni en Jordanie : le président, en jeans et « survêt », portant l’enfant de la chanteuse sur les épaules, et Carla admirant à travers ses lunettes de soleil la belle pierre de Pétra. Mais ils avaient en tête d’autres images, pas moins romanesques. Le couple en goguette à Disneyland, en pèlerinage à Rome, puis en visite à Louxor, main dans la main dans la vallée des Rois. Des images chargées de symboles, où deux êtres semblent s’aimer au pied des merveilles du monde, mais qui n’ont pas l’heur de plaire à une partie de l’opinion hexagonale.

La cote de Sarkozy s’effrite chez les femmes et les personnes âgées. Des catégories « porteuses d’une conception un peu moralisante de la politique », estimait hier sur France Info le politologue Pascal Perrineau. L’« effet » Carla pèse sans doute sur une partie de l’électorat conservateur, qui n’imagine pas Carla Bruni jouer le rôle rassurant d’une Anne-Aymone Giscard d’Estaing ou d’une Bernadette Chirac. Mais il pèse surtout au centre et à gauche. Sarkozy a beau présenter de lui un tableau déconcertant de « modernité », avec divorce, amourettes et familles recomposées à la clé, une partie de l’opinion y voit autre chose : l’argent, les hôtels luxueux, les avions privés, les stars sortant avec les stars. Les électeurs de gauche qui, au printemps dernier, avaient choisi Sarkozy pour son « parler vrai », et parce qu’il semblait incarner une certaine simplicité, sont désormais pris d’un doute.

Carla, bien sûr, n’explique pas tout. Sinon, le brave François Fillon ferait des miracles dans les sondages. Par contraste avec le tourbillonnant président, on plébisciterait ce père paisible de cinq enfants, marié depuis vingt-sept ans à une Galloise, ce premier ministre préférant le « travail dans l’ombre » aux croisières à Malte. Or, Fillon lui aussi voit sa cote baisser. 42% de confiance, -contre 45% en décembre et 53% en juillet. Cet affaissement, comme celui de Sarkozy, est loin d’être anormal pour une première année de mandat présidentiel. On avait vu bien pire sous Chirac-Juppé. Après l’état de grâce de l’été, les épreuves de l’automne et les premiers revers font, presque inévitablement, chuter la courbe des têtes de l’Exécutif. Il y a à cela des raisons économiques et sociales : si le chômage baisse lentement, la croissance n’atteint pas les niveaux espérés par le président.

Normal donc? A ceci près : Nicolas Sarkozy s’est énormément dépensé en huit mois de présidence. Il a fait, en termes de voyages, de visites de terrain, d’interventions à la télévision, de projets de loi, de libérations d’otages et d’opérations sauvetages, mais aussi de divorce et de passade, ce qu’un autre président faisait en trois, voire cinq ans. Il lui reste, n’en doutons pas, beaucoup de cartouches en poche. Mais le mode de l’hyper-présence médiatique, qu’il a privilégié jusque-là, semble aujourd’hui s’épuiser.


Commentaires (0)
Nouveau commentaire :