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Paolo Ferrero, un affranchi du PCI

Perspective communiste

C’est un secrétaire général au parcours atypique qui prend la tête de Refondation Communiste (l'Humanité)

Quelle que soit la politique qu’il mènera à la tête du Parti de la Refondation Communiste (PRC), Paolo Ferrero tranchera dans le paysage politique. Ce fils d’un ouvrier et d’une femme au foyer, qui travaillera de nuit à la FIAT au sortir des études, a été élu dimanche secrétaire général de Refondation par 142 voix contre 134, lors du comité politique national (CPN).

Né en 1960, il baigne dans la culture protestante de l’Église vaudoise, très impliquée aujourd’hui dans la défense des migrants. En 1985, il devient même secrétaire général de la Fédération de jeunesse évangélique italienne (FGEI), dont il est fier de dire que le slogan de la FGEI en 1969 était : « Nous nous disons marxistes et nous nous confessons croyants. »

Contrairement à ses trois prédécesseurs et à son opposant, lors du congrès de ce week-end, Nichi Vendola, Paolo Ferrero n’a pas fait le choix de l’imposant Parti communiste italien (PCI). Jeune, il adhère à Démocratie prolétarienne (DP), une formation d'extrême gauche, et reste critique de la ligne que le PCI a appliquée depuis les années soixante. Devenu secrétaire général, il est le symbole de cette génération d’acteurs de l’extrême gauche qui ont mis à disposition de Refondation leur savoir-faire militant, quand celle-ci a été créée en 1993.

Mis au chômage par la Fiat, depuis l’âge de vingt-sept ans, il occupe des responsabilités au sein de Démocratie prolétarienne, un groupe qui flirte avec les 2 % lors des élections, principal concurrent du PCI. En 1995, il prend des responsabilités au sein de Refondation et soutient la ligne de Fausto Bertinotti. Il s’occupe des relations avec les « mouvements », puis des questions de travail.
Toutes responsabilités qui le conduisent en 2006 à entrer au gouvernement. Il devient ministre de la Solidarité sociale de Romano Prodi, où il se fait connaître comme celui qui critique les mesures modérées du gouvernement, comme celles sur le Welfare State. Il n’en est pas moins partisan de la ligne de participation. « Je referais le choix du gouvernement 27 fois, mais je dois admettre qu’en ce moment Refondation souffre un peu », disait-il dans les colonnes de l’Espresso en septembre de l’année dernière.

Après la défaite du mois d’avril dernier, c’est lui qui mène la fronde au sein du secrétariat, puis du CPN du parti et renverse la majorité dont il faisait partie la veille. Jusqu’à dimanche, il laissait planer le doute sur sa candidature comme secrétaire général, il a été élu en fin d’après-midi.

Une page se tourne pour Refondation Communiste

Italie . Après l’immersion dans le mouvement altermondialiste et la participation au gouvernement Prodi, le PRC entame un nouveau chemin

« J’ai adhéré parce que j’aime le nom, Refondation, explique Enrico Del Vescovo. C’était une tentative de sauver le bébé de l’eau sale après la chute des pays de l’Est. » Celui-ci a adhéré en 2006 au Parti de la refondation communiste (PRC) pour l’immersion dans le mouvement altermondialiste, comme à Gênes contre le G8, et pour son rôle d’opposant au gouvernement Berlusconi (2001-2006). Ils sont nombreux les militants à voir cette période comme l’âge d’or du PRC. « Je me suis inscrit pour donner ma contribution pour sauver l’idée communiste et l’inscrire dans la prospective des temps modernes », résume Enrico Del Vescovo.

Dix mois après la dissolution du puissant Parti communiste italien (PCI), le PRC tient son congrès fondateur. « Il y avait débat sur le nom du parti », rappelle Simone Leoncini, trente-quatre ans. « Comme une majorité de délégués, j’ai choisi de mettre le mot Refondation. » Dès lors dans ce parti le mot « refondation » est tout un programme pour le parti, sur le plan des idées et des pratiques politiques. D’autant plus que la première organisation d’extrême gauche du pays, Démocratie prolétarienne (DP), choisit de se joindre aux anciens militants du PCI pour relancer le nouveau parti. Ses dirigeants sont après ce dernier congrès parmi les premiers dirigeants de l’organisation, avec Paolo Ferrero et Giovanni Russo Spena.

« Dans la première phase, il y avait une vitalité intéressante et un peu confuse », poursuit Simone Leoncini. En 1993, Fausto Bertinotti, ancien dirigeant syndicaliste socialiste, puis communiste, lâche le Parti des démocrates de gauche (ex-PCI), l’année suivante, il devient secrétaire général et lui imprime un nouveau cours. En 1996, il accepte d’apporter un soutien extérieur au premier gouvernement de centre-gauche de Romano Prodi, avant de la lui retirer en 1998.

Le président du PRC, Armando Cossutta, part alors avec le gros lot des parlementaires et fonde le Parti des communistes italiens. La formation politique s’immerge dans le mouvement des mouvements, l’altermondialisme. En 2006, il participe au deuxième gouvernement de Romano Prodi, pensant que le centre-gauche « pourrait être perméable aux demandes du mouvement social » et que le programme de gouvernement serait respecté. Un échec cuisant, qui conduit les partis à la gauche du Parti démocrate (PD) à ne faire que 3 % et disparaître du Parlement, malgré l’union de ses forces dans la Gauche - l’Arc-en-ciel. « Depuis que Fausto Bertinotti n’est plus secrétaire, on entre dans une phase complexe avec une poussée identitaire et une autre de large ouverture (la proposition du dépassement du PRC - NDLR). C’est ce qu’on voit dans le congrès », estime Simone Leoncini. Deux façons de reconquérir le peuple, la construction d’une gauche de peuple en unissant les forces de gauche sociales et politiques et l’autonomie communiste tout en se réinsérant dans le mouvement altermondialiste. C’est cette dernière option qui a été choisie, incarnée par Paolo Ferrero. Avec une moitié du parti qui refuse de participer aux directions, et dépendant des minorités radicales, il va tenter de « relancer le conflit social », et de réimplanter la gauche dans la société.


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