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Sahra Wagenknecht (Die Linke) : « J'ai du mal à féliciter SYRIZA pour sa victoire »

Perspective communiste

Sahra Wagenknecht, Vice-présidente de Die Linke, Députée au Bundestag - Traduction Irène Bonnaud, revue par Stathis Kouvélakis

Hier la Grèce a voté. Plus précisément, seule une moitié de la Grèce a voté, puisque plus de 45% des électeurs ont choisi de s’abstenir de ces élections dépourvues de possibilité de choix. La signature du nouveau mémorandum a transformé encore plus profondément la Grèce en un protectorat régi à distance par la Troika, et ôté tout pouvoir à son parlement.

Tant mieux si le parti corrompu qu’est Nouvelle Démocratie n’est pas parvenu à capitaliser politiquement de la déception née de ces événements. Mais quel que soit le vainqueur de ces élections, et il était connu avant même le vote, il doit se mouvoir dans un corset étroit, prescrit à l’avance : de nouvelles coupes dans les retraites et les budgets sociaux, des privatisations accélérées, de nouvelles destructions des droits des salariés, des salaires toujours plus bas, un chômage toujours plus élevé et une pauvreté encore aggravée pour la majorité de la population.

C’est pourquoi j’ai du mal à féliciter Syriza pour sa victoire. Un programme social qui améliorerait enfin les conditions de vie de la population grecque, ne peut être mis en œuvre par le nouveau gouvernement qu’en déchirant l’accord avec les créanciers, un accord aux conséquences économiques et sociales catastrophiques.

C’est cette question qui a conduit à la scission de Syriza. Certains sont sans doute déçus que la nouvelle formation Unité Populaire, née de la critique du cours mémorandaire de Syriza, ait raté de peu, avec 2,86% des voix, son entrée au parlement. Mais pour un mouvement qui n’existe que depuis un mois, qui ne dispose d’aucune des structures d’un parti, privé d’accès aux medias et de moyens financiers, même ce résultat mérite le respect.

Et quant à ceux et celles qui affirment sur un ton de triomphe facile que ce résultat serait la preuve que la critique du diktat de la Troika et de l’euro « est tout sauf populaire dans la population grecque », qu’ils nous permettent de leur rappeler ceci : lorsque le jeune parti WASG(1) , peu de temps après sa fondation au printemps 2005, a obtenu 2,2% des voix aux élections en Rhénanie du Nord-Westphalie, personne d’entre nous n’aurait alors réagi par une déclaration aussi stupide, telle que : « ces élections ont montré que la critique de G. Schröder et des lois Hartz est tout sauf populaire dans la population allemande ». Die Linke a par la suite eu l’occasion de prouver le contraire par ses résultats électoraux.

Pour la Grèce, le seul espoir est que Syriza s’en tienne cette fois à ses promesses électorales : ne pas appliquer le programme catastrophique de la Troika à la lettre, mais qu’il renégocie l’accord. Mais sans un plan B, il paraît improbable qu’il puisse disposer des moyens de pression nécessaires pour ouvrir une telle renégociation.

(1) : La WASG (Alternative pour la Travail et la Justice Sociale) a été créée en 2005 par des militants en rupture avec le parti social-démocrate allemand suite aux mesures néolibérales (réformes Hartz IV et « Agenda 2010 ») adoptées par le gouvernement de Gerhardt Schröder. Il a fusionné en 2007 avec le PDS (Parti du Socialisme Démocratique, héritier de l’ancien SED de la République Démocratique Allemande) pour créer Die Linke, l’actuelle formation de la gauche radicale allemande.

http://unitepopulaire-fr.org/2015/09/25/sahra-wagenknecht-jai-du-mal-a-feliciter-syriza-de-sa-victoire/


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