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Sur la situation en Grèce et l'attitude du KKE

Perspective communiste

Depuis dimanche la Grèce vient de connaître une crise politique majeur qui a vu l'effondrement du PASOK (PS grec), l'affaiblissement de la ND (droite), entrée d'un parti néo nazi et la percée de la coalition d'Alexis Tsipras SYRIZA (extrême gauche)

Il est toujours difficile d'appréhender la situation d'un pays autre que la France, c'est pour ça qu'il est intéressant d'avoir une vision plus objective de la situation pour éviter les impasses et les mauvaises interprétations entre ceux qui diront « le KKE ce sont des traitres » ou, comme ceux d'une certaine fraction dans le PCF, « c'est les plus beaux, c'est les meilleurs, les autres se sont des cons ».

La situation est donc complexe, même si le KKE a commis une erreur tactique, il faut analyser ça avec de la retenue et de la parcimonie.


Une situation complexe pour SYRIZA

Aujourd'hui les yeux sont tournés vers la Grèce, tant boursiers que politiques, du fait que la ND (droite) ai renoncé a constituer un gouvernement et que se soit Alexis Tsipras de SYRIZA qui ai été amené a proposer une alliance contre « les plans d'austérités » imposés à la Grèce par l'UE, la BCE et le FMI (la Troïka). Tout naturellement cette alliance exclurait les députés néo nazis.

Vers qui Alexis Tsipras peut-il se tourner ? SYRIZA obtient 16,67% des voix et 52 députés, bien qu'arrivé second le bonus des 50 députés a été donné à la ND arrivée première avec 18,87% (108 sièges). Dans le plus simple des calculs, une coalition gouvernementale peut être trouvée avec :

-La Gauche démocratique (DIMAR) qui a obtenue 6,10% et 19 sièges, scission de l'aile droit de SYRIZA et d'une partie du PASOK

-Le Parti Communiste de Grèce (KKE), qui avec 8,47% et 26 députés réalise un score en progression mais très insuffisant au vu de sa mobilisation contre les plans de rigueur de la Troïka imposé au peuple grec.

A ce compte, il faudrait 151 députés pour pouvoir valider ce schéma, or il n'y en a que 97. Et de plus il faudrait l'accord de ces partis, seul la Gauche démocratique est favorable sachant que le KKE a refusé sec. De nouvelles élections seront convoquées.

Une erreur tactique du KKE

Les rancœurs entre le Synaspismos (composante majoritaire dans la SYRIZA, issue du KKE) et le KKE sont importantes, notamment idéologiques. Sans vouloir revenir sur ces rancœurs, souvent justifiées, le Parti Communiste a commis une erreur tactique importante.

La situation politique montre plusieurs choses importantes :

-L'effondrement des partis du système (ND et PASOK) sévèrement sanctionnés
-Une radicalisation de l'électorat vers la gauche (SYRIZA, DIMAR et KKE)
-Un message politique des grecs qui exprime un raz le bol massif

Pour le KKE, même en progression, il s'agit d'une claque électorale car « le collaborateur de classe » se retrouve largement devant lui et que les luttes importantes, souvent magistrales, organisées avec le PAME, ne se sont pas traduite par un rapport de force sur l'échiquier politique.

A la différence de SYRIZA, le KKE bénéficie d'un encrage important dans les villes ouvrières et populaire, il bénéficie d'une ligne politique clair, sans sous entendus : le socialisme et le communisme. Cependant il aurait du accepté la main tendue par son rival, cela malgré les oppositions sur l'Union Européenne et sur la question de la dette. En effet le Parti Communiste, malgré ses réseaux forts et le PAME, est victime d'une image (a tord) de parti ultra sectaire et tourné sur lui et la révolution. Cet accord aurait pu avoir plusieurs avantages pour les communistes et le peuple grec :

-Sortir le KKE de son image faussement « sectaire » et ainsi renforcer l'espoir d'un peuple qui a intérêt au changement et au communisme, c'est renforcer aussi l'électorat du KKE, notamment en rassemblant ceux qui ont lutté au côté du PAME mais qui n'ont pas voté pour lui pour peser contre les partis institutionnels, le vote utile pour SYRIZA.

-Imposer une autre logique politique au peuple grec sachant que la situation est loin d'être révolutionnaire. Même en étant loin des 151 députés nécessaires pour s'imposer, il y aurait auprès des grecs un message fort, celui du tous contre les plans d'austérités. De fait la Vouli va être bientôt dissoute, et de nouvelles législatives seront convoquées. Il est fort probable que la ND et le PASOK se ressaisissent et s'imposent de nouveau dans le jeu électoral. Processus qui risque de marginaliser de fait les partis opposés à l'austérité. Une chance historique va être gâchée et c'est le KKE, fort à parier, qui sera mis aux bans des accusés.

-Imposer ses vues politiques et démasquer les contradictions politiques de SYRIZA. Oui SYRIZA est traversé par de grandes contradictions entre son combat révolutionnaire et ses propositions. Vouloir réformer l'Union Européenne est un leurre, vouloir sauver l'euro c'est valider la petite vérole, négocier avec le PASOK va à l'encontre des luttes populaires de ces dernières années. Le KKE est le seul a avoir la possibilité d'imposer des vues

-Imposer une situation pré-révolutionnaire que seul le KKE peut faire, mais pour réussir l'isolement doit être rompu et les masses doivent avoir conscience que le KKE est le seul a pouvoir le faire.

Ce qu'il aurait fallu faire

Rencontrer SYRIZA ça ne mange pas de pain, surtout pour le KKE qui possède une solide base, à la différence du parti d' Alexis Tsipras, qui n'a rien a perdre mais tout à gagner. De plus de cette rencontre les divergences entre les deux formations auraient pu s'exposer, notamment :

-Sur la dette : Le KKE est pour l'annulation de la dette là ou SYRIZA est pour sa renégociation et son réaménagement
-Sur l'Union Européenne : Le KKE est pour la sortie de l'UE et de l'euros alors que SYRIZA, sur les positions du PGE, est pour une illusoire refonte de l'Europe et du rôle de l'euro (ça vous dit rien?)
-Sur la vision de la Grèce post capitaliste, entre un SYRIZA dans la réforme (proportionnelles …) et le KKE favorable au renversement de l'état bourgeois et la création des conseils par section de production.

Les points de rapprochement sont malgré tout envisageable :

-Sur les nationalisations des secteurs clés de l'économie grecque, point commun qui permettra au KKE d'imposer ses vues sur les question de la planification de l'économie
-Sur le nécessaire espoir au peuple qu'il faut donner et dont il a besoin en temps de crise, car ce dernier saura sanctionner les « diviseurs ».

Admettons qu'une rencontre ai eu lieu, en rien le KKE n'a vendu son âme et en rien il signe un chèque en blanc. Aujourd'hui on peut constater que le Parti Communiste est isolé politiquement, c'est une citadelle assiégée, ce qui le rend totalement inapte a construire un mouvement révolutionnaire ou imposer des revendications immédiates. Le Parti bolchévique de Lénine, si il avait suivit la ligne du comité central du KKE, n'aurait jamais tenu Pétrograd en Octobre 1917, c'est l'apport, notamment rural, des socialistes révolutionnaires de gauche qui va permettre le triomphe de la Grande Révolution d'Octobre. Les communistes grecs doivent en avoir conscience.

Dans tous les cas la situation est figée, SYRIZA n'aura pas de majorité pour constituer un gouvernement, même avec un appui sans participation du KKE. Le KKE aurait du discuter et montrer ainsi a ceux qui, par vote utile, on choisi SYRIZA plutôt que le KKE que ce dernier est beaucoup plus lucide sur la crise, ses réponses et l'avenir du pays. Les prochaines élections législatives, qui auront lieu après dissolution, vont être une catastrophe pour la « gauche anti austérité », mais aussi pour le KKE qui sera accusé de tous les maux.

Sortir les drapeaux, charger comme des dératés face à de l'artillerie, c'est beau, romanesque mais inutile, et tactiquement stupide. Une chance historique a peut être été gâchée, c'est dommage, et dommage pour le KKE qui est un grand parti communiste. Demain les grecs connaitront encore l'austérité, la misère parce que deux partis ne se parlent pas.


Commentaires (5)
1. mathieu le 09/05/2012 18:47
tout simplement parfait!!!
2. Nicolas Maury le 09/05/2012 22:55
et triste mais j'ai un communiqué du KKE pour demain qui clarifie la situation
3. Trannoy le 11/05/2012 09:30
D'abord c'est aux grecs d'apprécier. Evitons de nous poser en donneur de leçons ce que l'article n'évite pas.
Dans cette affaire qui est sectaire :
1- Ceux qui s'accroche désespérément au mythe d'une possible Europe social
2- Ceux qui considère qu'une nation doit disposer de tous les attributs attachés à la souveraineté nationale.

Quelle erreurs ???? Je pense qu'il serait EXTRÊMEMENT dangereux que le KKE s'implique dans ce qui n'est sur le fond que marchandage. Au risque de laisser l'extrême droite récupérer la mise Pou ma part dans la situation trouble actuel je considère sa position comme sage. Les ambiguïtés du FDG ici sur le FOND (en particulier l'Europe) ont laissé un boulevard à Marine accroissant ainsi considérablement le risque MARINE pour 2017. Voilà ce qui risque de nous arriver à force de lâcher la proie pour l'ombre. La question reste entière, non résolue, SE RASSEMBLER POURQUOI, POUR QUELS OBJECTIFS, et cela sur la base tout à la fois d'une analyse partager de la société, et une perpective commune En sommes-nous là, j'en doute.
4. Nicolas Maury le 11/05/2012 11:09
Ce qui fait mal au cœur dans ces élections, c'est de voir les énormes mobilisations du KKE et du PAME, de voir une Grèce en lutte, qui ne lâche rien pour 8,5% des voix !!! Après l'un des défaut majeur que nous avons tous commis dans nos analyses c'est l'absence d'études des attentes des grecs et pourquoi SYRIZA fait 16%.

Aujourd'hui je pense que le KKE risque de payer cher, je le déplore, je le regrette, sa position strict vis à vis de SYRIZA. On sait deux choses :

-Il est hors de question pour le KKE de participer à un gouvernement avec SYRIZA, pour de nombreuses et justes raisons (UE, Euro, dette ...)
-Dans tous les cas même en coalition SYRIZA+KKE+DIMAR il n'y aurait que 97 sièges et il en faut 151 pour avoir une coalition

Dans tous les cas ça ne coutait rien de dire ok pour discuter, sachant que les discussion auraient échouées (pour les même raisons que plus haut) mais ça aurait été un signal fort pour ceux qui ont lutté au côté du PAME et qui se sont retrouvé a voter SYRIZA (après il serait intéressant de savoir pourquoi). C'est une posture tactique.

Les ambiguïtés du FdG on les connait, cependant les militants ont tranché maintenant on fait avec. J'ai combattu le programme, je l'ai critiqué, j'ai dénoncé son contenu social démocrate ou radical... mais un vote ça se respect et donc discipline.

Pour 2017, oui je partage ta vision, cependant je pense qu'il faudra combattre la social démocratie de manière féroce pour lutter efficacement contre le FN
5. Gilles Questiaux le 11/05/2012 14:58
De toute manière la gauche ne pouvait pas former de gouvernement. Ce qui est dommage c'est en effet l'image gauchiste sectaire que donne au KKE ce refus de discuter. Alors qu'un KKE minoritaire mais qui impose sa ligne à une coalition est mieux placé qu'un KKE fort dans les urnes mais isolé.
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