UMP
Nicolas Maury
Majoritaire à l'Assemblée mais censurée dans le pays
C’est bien le problème de cette droite (UMP-UDF). Elle a beau occuper tous les palais nationaux et dominer le paysage médiatique, elle ne dispose pas de majorité dans le pays pour faire accepter les dogmes libéraux. Cette réalité politique s’est imposée avec un éclat particulier, il y a presque un an, le 29 mai 2005, lorsque les Français ont rejeté le projet de constitution européenne, cette sorte de règlement intérieur du libéralisme à l’échelle de l’Union.
Plus récemment, et sous une autre forme, la résistance victorieuse de la jeunesse et autour d’elle de tout le monde du travail contre le CPE est un nouveau signal, un feu rouge pour tous ceux qui veulent précariser, désolidariser et donc fragiliser les salariés face au patronat et aux actionnaires.
Le débat sur la motion de censure présente l’intérêt de ramener à de plus justes proportions - c’est-à-dire à pas grand-chose - la portée réelle des désaccords de fond au sein de la droite. La guerre ouverte que se livrent Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin ne serait finalement qu’une intrigue de cour pour capter les dépouilles d’un règne finissant, si tout le pays n’était pas pris en otage, si les moyens de l’État n’étaient pas instrumentalisés au service d’une lutte de succession. Mais les affidés de Sarkozy sont main dans la main avec les fantassins du chiraquisme, face à la censure, pour soutenir une même politique, celle du gouvernement Villepin. Car derrière la ténébreuse affaire Clearstream, derrière les rodomontades d’un Sarkozy se posant en victime et en parangon de la transparence, la vie continue et la politique aussi.
Il faut censurer ce pouvoir. Pour cette loi inhumaine que sa majorité entérine, frappée du sceau du ministre de l’Intérieur, visant à faire des immigrés un réservoir d’exploitation corvéable et jetable. Les manifestants samedi dernier visaient juste en criant: “ Villepin, Sarkozy, le temps des colonies est fini ”.
Il faut le censurer pour ses agressions répétées contre le monde du travail. Le mouvement social l’a contraint à faire marche arrière sur le CPE. L’événement a constitué le premier recul conséquent depuis que la droite est revenue aux affaires en 2002. Mais la guerre des chefs, abondamment relayée par les médias, si elle traduit l’incandescence de la crise politique que traverse le pays, présente l’avantage pour la droite de reléguer au second plan la question sociale. Or, portés par leur victoire sur le CPE à destination des jeunes, les salariés sont plus forts aujourd’hui pour s’attaquer au CNE et à tous les autres contrats de précarité.
Il faut le censurer pour sa responsabilité quand EADS, dans lequel l’État est actionnaire, annonce la liquidation de la SOGERMA à Mérignac (6 000 emplois menacés), quand il poursuit les privatisations, quand il liquide sa minorité de blocage dans le cadre de la fusion Suez-GDF.
Ce ne sont pas les bonnes raisons de censurer ce pouvoir qui manquent