Perspective Com
Liban

Nicolas Maury

Pour l'arrêt des frappes Israëliennes et le désarmement des Islamistes du Hezbollah

Liban
Le Liban, comme tendent à le prouver deux siècles d’une histoire mouvementée, reste le terrain d’enjeux régionaux et internationaux qui le dépasse.

La géographie, l’histoire et de la sociologie font du pays du Cèdre, depuis au moins deux siècles, le lieu privilégié des affrontements des puissances régionales et, à travers elles, des grandes puissances qui ont largement contribué à façonner l’histoire de ce petit pays. Ainsi voit-on aujourd’hui, à travers la guerre entre Israël et le Hezbollah libanais, se profiler un affrontement beaucoup plus vaste : celui qui oppose les États-Unis de George Bush à la Syrie et à l’Iran, seules forces régionales à n’être pas encore passées sous les fourches Caudines américaines.

Israël, tout le monde en convient désormais, ne cherche pas à obtenir la libération de ses deux soldats capturés par le Hezbollah, mais à détruire le Hezbollah lui-même et à atteindre, à travers lui, la Syrie et l’Iran, ses alliés. Pour déstabiliser le Liban, Israël a donc choisi une fois encore la manière forte et la punition collective : infliger le maximum de pertes civiles et matérielles à l’ensemble de la population afin qu’une partie des Libanais se désolidarisent du Hezbollah et finisse par le rejeter en le tenant pour responsable de ses souffrances.

La chose n’est pas facile, car le Hezbollah n’est pas seulement une milice armée, comme cherche à le faire croire Israël, mais un parti politique solidement implanté dans la société libanaise. Il a obtenu près d’un tiers des suffrages lors des dernières élections et participe au gouvernement. Il est très implanté dans tout le sud du pays et la vallée de la Bekaa, où vit la majeure partie de la population chiite. De plus, il jouit d’un très grand respect de l’ensemble des Libanais - y compris les chrétiens - pour la part décisive qu’il a pris depuis 1982, date de sa création, juste après l’invasion du Liban par l’armée du général Sharon, dans la résistance à l’occupation israélienne. Une résistance qui devait contraindre l’armée israélienne à un retrait quasi total du Liban en 2000.

Il ne sera donc pas facile pour Israël de pousser les Libanais à se lancer dans une nouvelle guerre civile, comme celle qui éclata en 1975. À l’époque, Israël avait joué un rôle très important dans son déclenchement : après que l’OLP eut été chassée de Jordanie pour se réfugier au Liban, Israël avait multiplié les actions militaires et les raids contre le Liban. Le but officiel était (déjà !) de détruire les bases de l’organisation palestinienne qui harcelaient le nord d’Israël. Mais, comme aujourd’hui, l’armée israélienne, au lieu de s’en prendre uniquement aux bases de fedayin, visait des objectifs civils : l’aéroport de Beyrouth, par exemple, détruit en 1968 après la prise d’otage d’un avion d’El Al (compagnie israélienne) à Athènes. But : désolidariser les Libanais des Palestiniens et forcer le gouvernement de Beyrouth à s’en prendre lui-même à l’OLP, ce qu’il ne fera pas. Mais le résultat fut de dresser les Libanais les uns contre les autres - pro et anti Palestiniens, pro et anti Syriens, musulmans contre chrétiens - et de « stimuler le processus de décomposition de l’État » en précipitant le pays dans une guerre civile qui devait durer jusqu’en 1989.

Une guerre civile dans laquelle l’autre voisin encombrant du Liban, la Syrie, jouait sa carte, pour maintenir son influence, à la fois militaire et politique. C’est en effet Hafez el Assad qui réussit à imposer, en 1989, à l’ensemble des partis libanais les accords de Taef qui mettaient fin à la guerre civile et prévoyaient le désarmement de toutes les milices confessionnelles qui s’étaient affrontées pendant les quatorze ans de guerre civile.

Le paradoxe de l’invasion israélienne du Liban en 1982 et de son occupation fut qu’elle favorisa finalement les visées de Damas sur un pays que le régime d’Hafez el Assad avait toujours considéré comme partie intégrante de la « Grande Syrie », artificiellement séparé par les puissances occidentales. Celles-ci - et en particulier la France - avaient, dès le XIXe siècle, su tirer parti de la division de la population entre quatre confessions : chrétiens maronites, sunnites, chiites et druzes. C’est d’ailleurs la France, ancienne puissance « protectrice des chrétiens » qui, au moment de l’indépendance du Liban en 1943, imposa le système politique confessionnel qui a fait tant de tort aux Libanais et perdure encore aujourd’hui, bien que les accords de Taef aient prévu de le supprimer.

Aujourd’hui, le jeu de massacre continue. Le Liban reste le terrain d’un jeu qui le dépasse et les Libanais les quilles dont aucun des « joueurs » ne semble se préoccuper.Face à la complaisance de la communauté internationale, il y a urgence à se mobiliser pour stopper cette escalade et arrêter ces bombardements à l'origine de tant de morts, de souffrances et de destructions.

Le peuple libanais paie aujourd’hui au prix fort la logique de guerre israélienne. En lui manifestant notre solidarité devant cette douloureuse épreuve, nous voulons avant tout porter une logique de paix pour que s'impose, avant qu'il ne soit trop tard, une issue politique au Proche Orient, reposant sur le respect des droits des peuples libanais, israélien et palestinien.

Le Parti communiste exigera à cet occasion un arrêt des bombardements, le retrait des forces israéliennes du Liban et de Gaza, la libération des soldats israéliens des ministres et élus palestiniens détenus depuis le début de la crise et l'arrêt des tirs de roquettes du Hamas et du Hezbollah.


Commentaires (3)
1. Nicolas le 20/07/2006 14:23
l'appel du PC libanais
ici
2. guy queytan le 20/07/2006 14:35
Bonjour NICOLAS

Merci pour cet excellent article plein d'objectivité
Fraternellement
3. n le 20/07/2006 14:37
Lettre de Frédéric Dutoit a Jacques Chirac
ici
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