Un tourbillon dans un costume judiciaire tient en haleine le pays, depuis le lancement du mouvement «Oser l’avenir », ce samedi, par Me Aïssata Tall Sall. La mairesse de Podor ira à l’assaut des élections législatives et s’érige en candidate venue mettre fin à la «confusion politique» au Sénégal. Mais, entre la bataille du contrôle de l’électorat et l’accès au pouvoir se dressent des épreuves difficiles qui requièrent «nationalisme» et «droiture».
Aïssata Tall Sall avec « Oser l’Avenir » vient de faire le deuil d’un parcours poli- tique élogieux, dans le parti de Senghor. L’avocate a, en effet, décidé d’amputer Ousmane Tanor Dieng et le Parti socialiste d’une bonne frange de ses militants. Ce qui signifie un affaiblissement de l’allié de Macky Sall sur l’échiquier politique. Au-delà de sa volte-face, elle va devoir imaginer un nouveau futur politique pour engranger un poids électoral assez consistant, lors des prochaines législatives. Le lancement de son mouvement nous montre sa décision d’occulter une masse impressionnante de leaders politiques, aguerris aux combats politiques. En novice de bon aloi,sa stratégie à mener pour vaincre les adversaires et s’ériger un quota important de députés dans la 13ème législature va accorder une importance considérable à la communication et aux manœuvres de grande envergure, pour parer les attaques qui vont fuser de partout. Le message d’Aïssata Tall Sall se verra brouiller par les officines de com- munication politique au sein des coalitions de l’opposition et du pouvoir.
Le pari de l’impact psychologique
« C’est dans le confusionnisme que nais- sent toutes les aventures politiques sans lendemains », a soutenu la mairesse de Podor. Son constat est sans équivoque et elle va se démarquer des tenants du champ politique actuel, pour mener sa barque. Mais ne va-t-on pas dire qu’il s’agit là, une fois de plus, d’un procès d’intention à l’égard de ceux que la con- fiance des citoyens a investis des plus hautes responsabilités et qui, malgré la pression des affaires quotidiennes,n'arrivent pas à mesurer parfaitement les enjeux , il s'agit la pour Aissata Sall de réussir le pari de l'impact psychologie de son discoure et de démarche.
De l’événementiel à la longue durée, du terroir à l’économie monde, les temps et les espaces de l’histoire sont pluriels, ils s’emboîtent avec complexité. L’imbrication de l’immédiat, du moyen et du long terme constitue à son tour la principale difficulté pour les politiques orientés vers l’avenir. En effet, nos sys- tèmes politiques,rythmés par la cadence des élections - cinq ou sept ans - ne sont guère propices à l’élaboration d’un projet structurant le long terme et des stratégies qui y mènent. Cela d’autant plus que la vie démocratique régresse. Plus les pro- blèmes sont perçus dans leur dimension technique, plus ils échappent aux compé- tences des citoyens au profit des experts. « Les hommes politiques doivent clarifier leurs idées », a-t-elle soutenu pour édi- fier le peuple sur les objectifs de leurs politiques.
Formater la conscience des masses
Dans le contexte actuel de la politique dans notre pays, les populations sont anesthésiées dans leur compréhension des discours et stratégies électorales. Les Sénégalais auront-ils assez de temps pour mettre en branle leur pensée qui demande, pour se former et s’habituer à sa démarche, une distance critique, un temps de maturation. Nous sommes à deux mois des élections législatives qui constitueront, à coup sûr, un baromètre infaillible pour l’avenir présidentiel ou non de la patronne de «Oser l’Avenir». Pour réussir son coup, elle va devoir affronter des monstres politiques dans l’art de détruire et de déstabiliser au plus petit détail et à s’armer d’un plan
d’attaque psycho-politique contre le pou- voir en place, présidé par Macky Sall. Les axes de sa démarche semblent claires et vont devoir exercer une pression psy- chologique en direction des couches supérieures et moyennement supérieurs de la société, afin d’obtenir au bout du compte le refus total d’un présidential- isme fort et une Assemblée nationale aux basques de l’Exécutif ; des couch- es moyennes et inférieures, pour leur démontrer les préjudices qu’entraînent des alternances sans projets viables pour les intérêts du pays et exiger que leurs représentants politiques votent contre les tenants de la seconde alternance. En d’autres termes,AïssataTall Sall devra for- mater la conscience des masses contre les projets politiques actuels, même si elle incarne une bonne partie de ces projets, afin d’établir une pression de bas en haut, afin que les représentant du peuple qui se trouvent dans le doute épousent l’attitude exigée d’elle par la base. Elle en est consciente quand elle parle d’«affronter toutes les difficultés, celles présentes comme celles à venir».
Révision des théorèmes politiques
En effet, il ne s’agit pas de prôner un « nationalisme » et « une droiture » pour venir à bout des pratiques politiques
désuètes et d’une consommation de l’offre politique sans logique aucune. Il n’est pas de théorème politique qu’un peu d’histoire n’oblige à réviser.Aïssata Tall Sall, certes, a un parcours élogieux. Ministre de la communication, du 4 juillet au 4 avril 2000 et porte-parole du dernier gouvernement socialiste dirigé par Mamadou Lamine Loum. Dans l’opposition, pour ses combats politiques, et ses prises de positions courageuses, elle résiste à la transhumance malgré les nombreuses pressions et menaces du régime libéral. Depuis 2009 elle est dev- enue mairesse de Podor.Au plan national, elle a été à la pointe du combat dans tous les procès des opposants au régime de Abdoulaye Wade. De 2000 à 2010; ainsi Abdourahim Agne, Ibrahima Sène,Amath Dansokho, Jean Paul Dias, Barthélémy Dias, Malick Noel Seck et d'autres per- sonnalités du monde politique ont béné- ficié de l'assistance juridique de Maître Aissata Tall Sall.
Depuis 2012, elle siège à l’hémicycle sous la bannière de Benno Bokk Yakaar. La phénoménale ascension de l’avocate pourrait faire mouche. Elle risque de bouleverser toutes les données de la situation avec Khalifa Sall qui va vers un procès incertain, Manko Taxawu Senegaal,encore embryonnaire,et la plu- part des leaders politiques qui songent à économiser un capital politique large- ment écorné.