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E.Macron : Le libéralisme et la finance toujours au pouvoir (2017-)

Tête de liste LREM aux européennes, Nathalie Loiseau se présente comme le principal barrage à l’extrême droite. Dans sa jeunesse pourtant, elle fut candidate aux élections étudiantes de Sciences-Po Paris, sous l’étiquette de l’UED, un syndicat né sur les cendres du GUD et prônant l’union des droites. Elle assure n’avoir à l’époque « pas perçu » la couleur politique de ce syndicat


Etudiante, Nathalie Loiseau a figuré sur une liste d’extrême droite (Médiapart)
Elle a fait de la lutte contre les « nationalistes » en général, et contre l’extrême droite française en particulier, son cheval de bataille pour les élections européennes. Depuis son passage au Quai d’Orsay, et plus encore aujourd’hui qu’elle conduit la liste La République en marche (LREM) pour le scrutin du 26 mai, Nathalie Loiseau ne rate jamais une occasion de se présenter comme le principal rempart au parti de Marine Le Pen (voir ici, là ou encore là). Dans sa jeunesse pourtant, l’ancienne ministre s’est engagée, le temps d’une élection, aux côtés de militants d’extrême droite, pour certains issus des rangs du Groupe union défense (GUD).

C’était en 1984, à Sciences-Po Paris. À l’époque, Nathalie Loiseau s’appelle encore Nathalie Ducoulombier. Entrée rue Saint-Guillaume en 1980, diplômée trois ans plus tard, la jeune femme de vingt ans enchaîne alors sur une quatrième année dans la filière dite « Prép’ENA » (École nationale d’administration) de Sciences-Po, tout en passant une grande partie de son temps à étudier le chinois à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), afin de préparer le concours du Quai d’Orsay.

Les 25 et 26 janvier 1984, se tiennent, rue Saint-Guillaume, les élections des délégués étudiants au conseil de direction et à la commission paritaire de l’établissement. Selon un document déjà cité par Mediapart en janvier 2018, Nathalie Ducoulombier apparaît cette année-là en sixième position sur la liste « commission paritaire » de l’Union des étudiants de droite (UED), un syndicat étudiant né sur les cendres du GUD à Sciences-Po et prônant l’union des droites et de tous ses courants de pensée, « maurrassiens, indépendants, gaullistes… ».

Son nom figure parmi ceux de sept autres candidats, dont Christophe Bay, un haut fonctionnaire ayant contribué officieusement au programme de la candidate du Rassemblement national (RN) en 2017.

La première fois que Mediapart a interrogé ses équipes au sujet de ce document, fin mars, leur réponse fut catégorique : « C’est un faux. » « Elle n’a jamais été sur cette liste, elle n’a jamais été engagée à l’UED. Elle était membre des États généraux des étudiants d’Europe [une association qui ne sera formellement créée qu’en 1985, soit un an plus tard – ndlr] », avait immédiatement démenti son entourage, nous invitant à « bien vérifier » notre information.

Etudiante, Nathalie Loiseau a figuré sur une liste d’extrême droite (Médiapart)
Mediapart a pourtant pu authentifier le document en question, conservé dans les archives officielles de Sciences-Po Paris. Et a pu également vérifier qu’il s’agissait bien de l’ancienne ministre : en 1984, une seule étudiante portant le nom de Nathalie, Lydie, Ducoulombier, née en juin 1964, est inscrite dans la filière dite « Prép’ENA ». Ce sont bien les noms et date de naissance – publics – de Nathalie Loiseau. De nouveau questionnée au mois d’avril, la candidate LREM a d’abord répondu n’« avoir aucun souvenir » de sa présence sur une liste de l’UED. Puis, confrontée au document, elle a fini par reconnaître une « erreur ».

Dans un entretien accordé à Mediapart le 22 avril, elle explique : « À ce moment-là, j’ai été, d’après mes recoupements – parce que pour être tout à fait honnête j’avais complètement oublié cet épisode –, approchée pour participer à une liste qui voulait accentuer le pluralisme à Sciences-Po, alors quasi inexistant, et qui cherchait des femmes. J’ai dit oui. »

L’ancienne ministre assure ne pas s’être « plus que cela intéressée à cette liste » et affirme qu'elle ne connaissait qu’un de ses colistiers, inscrit comme elle en « Prép’ENA », et qui « n’était pas d’extrême droite ». « J’aurais sans doute dû regarder de plus près de quoi il s’agissait », admet-elle, précisant que si elle avait « milité, tracté, fait campagne », elle « [s’]en souviendrai[t], et ce n’est pas le cas ».

« Si ceux qui étaient sur la liste avaient un agenda extrémiste, je ne les ai pas fréquentés, je ne l’ai pas perçu, et si c’est le cas c’est une erreur. Si j’avais identifié des membres du GUD sur cette liste, évidemment que je n’aurais pas accepté d’y figurer. Je regrette d’avoir été associée à ces gens-là », poursuit-elle. Elle explique aussi avoir été, après son baccalauréat, inscrite en droit à l’université de Paris-II-Assas et en être partie « au bout de deux semaines, parce que c’était irrespirable » : « La fachosphère y était visible, assumée dans ces années-là, pas à Sciences-Po. »

« Les modérés trahissent votre confiance »

Si la présence de Nathalie Loiseau sur cette liste interroge, c’est d’abord parce que l’UED n’est pas n’importe quel syndicat étudiant. À sa création en 1978, il affiche d’emblée la couleur, appelant à l’union des droites et de tous ses courants de pensée (« maurrassiens, indépendants, gaullistes… », précisent ses fondateurs).

« L’U.E.D. s’opposera fermement à toutes les propositions qui, sous couvert de “démocratisation”, visent à instaurer la démagogie et le terrorisme marxiste », indiquent-ils sans ambages dans leur tout premier programme, pointant, à trois ans de l’élection de François Mitterrand, le « danger croissant que fait peser la montée de la gauche à l’extérieur et à l’intérieur de Sc.Po ».

À l’époque, les affrontements entre militants nationalistes et activistes d’extrême gauche sont monnaie courante dans les facultés. Et ils sont souvent violents. L’histoire de l’UED en est ponctuée. « Durant toutes ces années, les rixes sont fréquentes à Sciences-Po, un des rares établissements où droitistes et gauchistes subsistent », reconnaissent les auteurs des Rats maudits, une histoire des étudiants nationalistes (1965-1995) écrite par ses protagonistes, dont des figures du GUD telles que Frédéric Chatillon, un très proche de Marine Le Pen.

« L’UED va incarner le nationalisme à Sciences-Po, jusqu’en 1986. Elle est née de la volonté unitaire de nationalistes issus du GUD, du GAJ [Groupe action jeunesse], du GRECE [Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne] et même des deux linguistes du… Comité France-Allemagne (sic) », expliquent-ils.

Etudiante, Nathalie Loiseau a figuré sur une liste d’extrême droite (Médiapart)
Dans leur ouvrage, les ex-gudards détaillent également la stratégie adoptée au début des années 1980 pour agréger des étudiants issus des rangs du RPR ou de l’UDF, pourtant déjà représentés au sein de l’établissement par l’UDEG (Union des étudiants gaullistes) et le CELF, jugés bien trop « démagogues ». « L’UED, malgré l’origine radicale de ses fondateurs, joue électoralement la carte droitière et antigauche. Et ça marche ! », s’enthousiasment-ils.
Avant de poursuivre : « Elle conquiert une forte assise électorale, qui culminera en 1984 [l’année où Nathalie Ducoulombier figure sur la liste – ndlr] avec 17 % des suffrages [pour être précis, les listes « conseil de direction » et « commission paritaire » de l’UED engrangent cette année-là respectivement 15,9 % et 15,7 % des suffrages exprimés, seules les têtes de liste sont élues – ndlr]. Plus “intello” que le GUD-Assas, l’UED cultive un humour et un sens de la provocation très “hard” que ne renient pas les cousins de Paris II. On compte dans ses rangs de futurs magistrats, financiers, députés hauts fonctionnaires. Bref, du gratin facho. »

À partir de 1981, et avec l’entrée au gouvernement de quatre ministres communistes, le syndicat étudiant se vit, rue Saint-Guillaume, comme un îlot de résistance aux « gauchistes » qui sont au pouvoir. Comme le racontent les auteurs des Rats maudits, il « n’hésite pas à diffuser » des extraits du pamphlet antisémite de Céline L’École des cadavres ou du roman de Jean Raspail, Le Camp des saints. Il publie également une revue, Réplique, dont Mediapart a retrouvé plusieurs exemplaires.

« Notre honneur, c’est de nous affirmer de droite et de refuser les compromis avec les petits tâcherons du libéralisme mou ou du passéisme fossile », peut-on par exemple y lire. Ses auteurs adoptent déjà tous les codes de la rhétorique d’extrême droite, prétendument bâillonnée : « Une voix libre s’élève à droite, elle dérange, il faut la faire taire. »

C’est dans les colonnes de Réplique que feu le journaliste d’extrême droite Emmanuel Ratier, figure des milieux nationalistes radicaux, a écrit quelques-uns de ses premiers billets. Étudiant à Sciences-Po Paris de 1980 à 1982, il est, à plusieurs reprises, candidat aux élections étudiantes pour l’UED. C’est notamment le cas en 1982, année où l’on retrouve également sur la liste du syndicat Frédéric Sauvegrain, qui côtoyait à l’époque des militants du GUD et fera affaire, en 2015, avec certains membres de la « GUD connection », ce réseau informel d'anciens proches du groupuscule (lire notre enquête).

Les élections étudiantes de Sciences-Po Paris ont vu bon nombre de gudards se présenter sous l’étiquette de l’UED. En 1984, la liste où figurent les noms de Nathalie Ducoulombier et de Christophe Bay, le conseiller officieux de Marine Le Pen évoqué plus haut, est d’ailleurs menée par un militant de l’organisation, qui s’occupait à l’époque des liens du GUD avec la presse.

Cette année-là, le syndicat conclut son tract de campagne sur un message on ne peut plus clair, inscrit en lettres capitales : « LES MODÉRÉS TRAHISSENT VOTRE CONFIANCE – LA GAUCHE VEUT DÉTRUIRE VOTRE ÉCOLE – DÉFENDEZ-VOUS – VOTEZ U.E.D. »

Trente-cinq ans plus tard, le souvenir de l’UED ne subsiste guère plus que dans la mémoire de ceux qui l’ont connue et dans les archives de Sciences-Po Paris. C’est là que sont également conservés les tracts des syndicats étudiants adverses, notamment ceux de l’Unef, qui dénonçait régulièrement les « agressions fascistes » de ceux qu’il qualifiait alors de « nazillons » et la passivité de la direction de la rue Saint-Guillaume à leur égard.

Dans un document de campagne diffusé avant l’élection de 1984, l’Unef expliquait encore comment l’UED avait fait de l’« entrisme » dans les partis traditionnels, selon « une politique coordonnée au niveau national ». « Ils restent fascistes, mais peuvent exhiber la carte d’un parti “convenable” », écrivait alors le syndicat de gauche.

Cet engagement de Nathalie Loiseau est certes lointain, mais il prend aujourd’hui une dimension particulière au regard du positionnement qu’elle défend dans son face-à-face avec Marine Le Pen. Lors de notre entretien, la candidate LREM a tenu à souligner qu’elle n’avait « jamais eu d’engagement à l’extrême droite, ni proche de l’extrême droite, ni de fréquentations d’extrême droite » et qu’elle avait au contraire toujours combattu ces idées. « Le fait de conduire la liste que je conduis aujourd’hui, avec pour ambition de faire reculer l’extrême droite en France, est cohérent avec ce que je pense », a-t-elle ajouté.

Avant elle, d’autres figures de la droite gaulliste avaient fait le choix de s’expliquer sur leur passage dans des listes ou structures d’extrême droite. À l'image d’Alain Madelin, Patrick Devedjian ou encore Gérard Longuet qui avaient, eux, activement milité au sein du mouvement Occident pendant leurs années étudiantes, avant de devenir, des décennies plus tard, ministres sous l’étiquette UDF, puis UMP.

PAR ELLEN SALVI ET MARINE TURCHI
Médiapart

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