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Histoire du mouvement social et communiste

Élue conseillère municipale en 1925 à Douarnenez, à une époque où les femmes sont dépourvues de droits politiques, le cas de Joséphine Pencalet reste inédit en Bretagne jusqu’à l’obtention du droit de vote par les femmes le 21 avril 1944. Retour sur l’histoire de cette ouvrière, pionnière de la cause féminine méconnue en Bretagne comme en France


Joséphine Pencalet, la première Bretonne élue et communiste
« Douarnenez, toujours à la pointe du combat social, a élu triomphalement une femme! C’est notre camarade Joséphine Pencalet…» C’est ainsi que la Une du journal L’Humanité du 6 mai 1925 saluait l’élection, au premier tour des municipales avec 1283 voix, de cette ouvrière bretonne. Pourtant, rien ne prédestinait cette Finistérienne âgée de 39 ans, à entrer dans l’histoire comme la première femme élue de Bretagne, et l’une des seules dans l’Hexagone à cette période. Née le 18 août 1886, dans une famille nombreuse de marins-pêcheurs, Joséphine Pencalet monte à Paris pour trouver un travail de domestique. Malgré la désapprobation de ses parents, elle épouse en 1908 Léon Leray, un Breton comme elle, employé des chemins de fer. Ils se sont rencontrés à Douarnenez au début du siècle, lorsque Léon effectuait son service militaire dans la Marine. Le couple a deux enfants lorsque Léon meurt de la typhoïde, au sortir de la Grande Guerre. Joséphine se retrouve veuve, et décide de rentrer à Douarnenez.

La grande grève de 1924
La grande grève de 1924
Une Penn Sardin

Elle est embauchée comme ouvrière chez Chancerelle, la plus ancienne conserverie de la ville. À cette époque, les Penn Sardin - les « têtes de sardines » en breton, c’est ainsi qu’on appelle les ouvrières des usines de conserves de poissons à Douarnenez, en raison de leur coiffe - connaissent des conditions de travail très difficiles. En novembre 1924, elles entament une grande grève qui dure plusieurs semaines. Joséphine Pencalet participe au mouvement et devient même secrétaire-adjointe du bureau des Métaux de Douarnenez, affilié à la CGT Unitaire. Les ouvrières obtiennent finalement gain de cause, cette victoire a un retentissement dans toute la France. Quelques mois plus tard, lors des élections municipales de mai 1925, le maire sortant de la ville portuaire bretonne, le communiste Daniel Le Flanchec, propose à Joséphine Pencalet de rejoindre sa liste, où elle figure en quatrième position.

Une consigne venue de Moscou

Pour ce scrutin, le Parti communiste français décide en effet de présenter une dizaine de femmes dans l’Hexagone, à la demande de Moscou. Douarnenez est alors l’une des deux seules municipalités communistes de France, et Daniel Le Flanchec compte bien se servir du succès des Penn Sardin pour aider à sa réélection. D’autant plus que la question du vote féminin est alors très présente. Les femmes ont pris une part importante dans la société pendant la dernière guerre, en remplaçant les hommes dans les usines, et certaines réclament une égalité toute légitime. Pas moins de trois propositions de loi sont déposées devant l’Assemblée nationale, plusieurs hommes politiques - tous bords confondus - sont en faveur de la réforme. Mais le Sénat fait obstruction, et rien ne change. Si les femmes n’ont toujours pas le droit de vote et ne peuvent pas être élues, cela n’empêche pas le PCF de présenter des candidates. « Les femmes sont exclues de la citoyenneté politique, mais dans le cadre des municipales, la loi électorale de 1884 prévoit qu’on vérifie a posteriori l’éligibilité des élus », explique Fanny Bugnon, historienne qui a travaillé sur le cas de la Bretonne. Faut-il encore trouver une volontaire, chose compliquée comme le raconte le syndicaliste et futur résistant rennais Charles Tillon, dans ses Mémoires: « À vrai dire, la difficulté n’était pas de la faire élire, mais de trouver une citoyenne qui consentît à jouer les suffragettes comme en Angleterre ! Pas un ménage n’accepta ce sacrifice. Seule une avenante veuve, Joséphine Pencalet, se dévoua. Elle avait souvent tenu le drapeau rouge par les rues. Elle sut se moquer des menaces du préfet, trinquer avec les pêcheurs et rembarrer les blagueurs…».

Une élection annulée par le préfet

L’ouvrière est donc élue au premier tour et siège durant six mois au conseil municipal de Douarnenez. Mais comme attendu, quelques semaines après le scrutin, la préfecture du Finistère invalide l’élection de la candidate communiste, «considérant qu’en l’état actuel de la loi, les femmes ne sont, en France, ni éligibles ni même électrices aux élections municipales». Joséphine Pencalet fait appel et saisit le Conseil d’État, qui confirme malheureusement la décision le 27 novembre 1925. À Douarnenez, «l’annulation de l’élection de Joséphine Pencalet [...]n’occasionne aucun trouble à l’ordre public», précise l’historienne. Pourtant célébrée quelques mois plus tôt dans ses colonnes, la presse communiste nationale ne fait aucune mention de la décision du Conseil d’État. Du jour au lendemain, la première Bretonne élue retourne à l’anonymat de sa vie ouvrière. Si elle conserve ses convictions, elle garde, jusqu’à sa mort le 13 juillet 1972, à l’âge de 85 ans, le sentiment d’avoir été utilisée et nourrit une profonde amertume envers la classe politique.

En savoir plus

« Joséphine Pencalet, une Penn Sardin à la mairie », de Fanny Bugnon, publié dans «Bretonnes, des identités au carrefour du genre, de la culture et du territoire», collectif, éd. PUR, 2016.

« 1925, Joséphine Pencalet, une pionnière », film documentaire d’Anne Gouerou, collection Aux urnes universelles, prod. Beo, 2015.

« On chantait rouge », Charles Tillon, éditions Robert Laffont, 1977.

« Douarnenez, histoire d’une ville », Jean-Michel Le Boulanger, éditions Palantines, 2000. « Il y a un siècle, les femmes et la mer », Nelson Cazeils et Fanny Cazeils-Fennec, éditions Ouest-France, 2003.


source Le Télégramme

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