Magnifica force son départ de Saint-Nazaire

La préfecture a dû réquisitionner des personnels pour ouvrir l'écluse alors que le navire, qui devait effectuer sa croisière inaugurale vers Southampton, au Royaume-Uni, était bloqué dans sa cale par des agents CGT du port de Nantes/Saint-Nazaire.
L'armateur italo-suisse MSC avait fait de ce déblocage une condition sine qua non à la signature d'une "lettre d'intention de commande" d'un prochain paquebot, dont la construction est vitale pour l'avenir des ex-Chantiers de l'Atlantique, qui traversent une crise sans précédent.
L'entreprise de construction navale, qui n'a plus enregistré de commande depuis avril 2009, n'a en effet plus pour horizon que la livraison en mai du paquebot Norwegian Epic à la compagnie NCL et celle en octobre du Bâtiment de projection et de commandement (BPC) à la Marine française.
Elle avait programmé fin janvier 480.000 heures de chômage partiel de mars à mai, et travaille toujours sur un plan de 351 départs volontaires parmi ses 2.400 salariés.
Le recours à la force pour faire partir le MSC Magnifica a été décrié par les personnels CGT du port de Nantes/Saint-Nazaire, en grève depuis mardi après l'échec de négociations locales sur l'application de réforme portuaire.
"Un agent du port a été réquisitionné illégalement, encadré par les forces de l'ordre, puis isolé. Il a fait sortir le navire sous la menace de 10.000 euros d'amende, et de six mois de prison", rapporte le syndicat dans un communiqué.
La fédération CGT des ports et docks a immédiatement appelé jeudi à la grève dans tous les ports français vendredi contre ce qu'elle considère comme une atteinte au droit de grève.
UNE SIGNATURE DANS "QUELQUES JOURS"
La préfecture de Loire-Atlantique a justifié son action.
"Cette situation empêchait tout navire d'accoster en urgence en raison des conditions météorologiques défavorables annoncées à partir de ce jour par Météo France", a-t-elle dit.
En attendant, le départ en mer du MSC Magnifica et de ses 600 passagers permet aux chantiers navals STX d'échapper à de lourdes indemnités, et de pouvoir espérer une conclusion rapide de la commande du futur paquebot.
"On n'a pas encore signé mais on pourra le confirmer prochainement, dans quelque jours je pense, il reste encore de petites choses à finaliser", a déclaré Gianluigi Aponte, président de MSC, lors d'une conférence de presse en marge de la livraison du Magnifica.
Un accord de principe avait été trouvé mercredi soir pour un paquebot similaire au MSC Fantasia, un navire lancé en décembre 2008 qui dispose d'un simulateur de Formule 1, d'un cinéma interactif en 4D ou encore d'une grotte thermale.
Sa construction devrait fournir cinq millions d'heures de travail à STX France, branche du groupe sud-coréen STX dans laquelle l'Etat français est actionnaire à 33,34 %.
"L'Etat est resté totalement mobilisé aux côtés de STX France pour concrétiser cette commande, dans le cadre des dispositifs d'assurance crédit export mis en oeuvre par Coface (Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur)», s'était félicitée dès mercredi la présidence de la République.
Joël Cadoret, secrétaire général des ouvriers CGT des chantiers navals de Saint-Nazaire, a estimé qu'il s'agissait d'une "nouvelle bienvenue, mais insuffisante".
"Un paquebot est un navire répétitif, qui ne génère pas beaucoup de travail dans nos bureaux d'études", a-t-il dit en souhaitant "la commande d'un prototype pour soutenir leur activité".
Selon les syndicats, la reprise du travail ne pourra pas se faire du jour au lendemain.
"Nos ateliers, qui sont tous à l'arrêt depuis une semaine, ne vont reprendre que petit à petit. Nos sous-traitants vont donc avoir encore six mois de sous-charge de travail, entre le départ du Norwegian Epic et le début de l'assemblage du nouveau paquebot", estime Marc Ménager, délégué syndical (CFDT).

Source: Reuters via Yahoo