Il fait particulièrement beau ce midi. Christine et Sylvain progressent à pied vers leur objectif. Quelques minutes à peine les séparent du siège de l’Urssaf où ils ont évalué avec le chef de la cellule de lutte contre le travail dissimulé la légitimité de leur démarche. Tout en marchant, ils conviennent du rôle que chacun doit tenir dans le restaurant à contrôler. Détendus, ils n’en sont pas moins très concentrés sur leur tâche du moment. Dès qu’ils auront passé la porte d’entrée, les deux inspecteurs joueront leur scène, en direct. Rien ne sera laissé au hasard car à tout moment, le bon déroulement souhaité, peut muer en épreuve.
La lutte contre le travail illégal constitue une priorité. « En un an, il y a eu une prise de conscience sur ses méfaits, analyse Eric Tromeur, directeur général à l’Urssaf des Bouches-du-Rhône. Certes, c’est encore embryonnaire mais cela se traduit par des faits concrets. Nous aurons réussi le pari quand nous serons passés de l’actuel ‘‘ pas vu, pas pris’’ individuel, au ‘‘ c’est pas bien’’ collectif ». Initiateur fin 2005, de la première campagne de communication concernant le travail illégal, dans huit villes de Bretagne, Eric Tromeur, est un ardent défenseur du volet prévention et information. Il se félicite des avancées importantes dans les domaines de l’alcoolisme et de la vitesse au volant, de la défense des non-fumeurs, mais estime qu’il faut serrer les objectifs et ne pas se tromper de cible. A la fronde des citoyens contre « ces administrations qui s’en prennent toujours aux petits mais jamais au gros voleurs », il oppose une réponse organisationnelle, pragmatique, statistique. Quand se présentent les affaires, il fait évaluer la teneur du préjudice financier ainsi que les conséquences pour les salariés. « Je ne vais pas envoyer au Tribunal un employeur de nounou ! Notre priorité en revanche, concerne les dossiers dans lesquels les salariés se retrouvent dans un système proche de l’esclavagisme ». Entre ces deux cas, l’Urssaf poursuit son objectif avec une devise : « Personne n’est à l’abri des contrôles ». Avec 48 inspecteurs, l’Urssaf13 consacre l’essentiel de ses moyens de contrôles « à l’assiette déclarée ». Cependant 13% des moyens ont été réorientés pour enrichir la cellule de lutte contre le travail illégal. Ces dix derniers mois, elle a effectué 209 opérations ciblées dont 65% de contrôles révélés positifs et 367 actions aléatoires. Ce qui se traduit par la modique somme de 3 millions d’euros dus par les établissements délictueux.
Christine et Sylvain entrent dans le restaurant. Derrière son comptoir, la responsable les accueille. « Oui, oui… C’est un contrôle ? Faites. Il n’y a pas de problème ». Tout en feuilletant le registre unique du personnel, Sylvain débute par une série de questions pendant que Christine se rend en cuisine. La patronne est stressée mais elle reste calme. Ses yeux balaient la salle d’un bout à l’autre. Au gré de ses allers et venues, la serveuse envoie les plats, commande les cafés au passage et interrompt à plusieurs reprises la conversation pour l’encaissement des additions. La patronne enregistre l’information mais elle panique : « je ne sais plus où j’ai mis le numéro de l’expert comptable… ». On aperçoit Christine à travers le passe-plats. Le tableau de présence sur lequel doivent figurer les jours et heures effectives est affiché sur la porte, à l’intérieur de la cuisine. Les deux employées ont rempli un « procès-verbal d’audition salarié », soit une trentaine de question sur leurs pratiques, leur activité au moment du contrôle. En un rien de temps, les déclarations sont recoupées. La serveuse est en CDI, du lundi au vendredi, trois heures par jour de 11h30 à 14h30. La cuisinière en fait deux de plus, de 10h30 à 15h30. Tout semble correct. « Nous sommes en plein service et c’est la première fois que je suis contrôlée, explique la responsable. Je ne me souvenais même plus du prénom de mes employées. Je trouve cela normal même si ce n’est pas évident à gérer. » En huit années de terrain, Christine en a vu d’autres. Elle rassure d’un « ça revient vite quand c’est vrai ! On va faire des vérifications. Vous ne devriez pas avoir de nos nouvelles, à priori ». La professionnelle reste prudente. Le restaurant quant à lui, semble tout entier soulagé. Les deux inspecteurs quittent le lieu. « Elle était un peu paniquée, c’est vrai. Je le prends comme un bon signe car souvent, ceux qui n’ont rien à se reprocher, sont dans cet état. Les autres ont un aplomb incroyable ! Maintenant nous rentrons examiner le bordereau de déclaration, les heures, les bulletins de salaires et contrats de travail que nous avons demandés. On jugera après».
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La lutte contre le travail illégal constitue une priorité. « En un an, il y a eu une prise de conscience sur ses méfaits, analyse Eric Tromeur, directeur général à l’Urssaf des Bouches-du-Rhône. Certes, c’est encore embryonnaire mais cela se traduit par des faits concrets. Nous aurons réussi le pari quand nous serons passés de l’actuel ‘‘ pas vu, pas pris’’ individuel, au ‘‘ c’est pas bien’’ collectif ». Initiateur fin 2005, de la première campagne de communication concernant le travail illégal, dans huit villes de Bretagne, Eric Tromeur, est un ardent défenseur du volet prévention et information. Il se félicite des avancées importantes dans les domaines de l’alcoolisme et de la vitesse au volant, de la défense des non-fumeurs, mais estime qu’il faut serrer les objectifs et ne pas se tromper de cible. A la fronde des citoyens contre « ces administrations qui s’en prennent toujours aux petits mais jamais au gros voleurs », il oppose une réponse organisationnelle, pragmatique, statistique. Quand se présentent les affaires, il fait évaluer la teneur du préjudice financier ainsi que les conséquences pour les salariés. « Je ne vais pas envoyer au Tribunal un employeur de nounou ! Notre priorité en revanche, concerne les dossiers dans lesquels les salariés se retrouvent dans un système proche de l’esclavagisme ». Entre ces deux cas, l’Urssaf poursuit son objectif avec une devise : « Personne n’est à l’abri des contrôles ». Avec 48 inspecteurs, l’Urssaf13 consacre l’essentiel de ses moyens de contrôles « à l’assiette déclarée ». Cependant 13% des moyens ont été réorientés pour enrichir la cellule de lutte contre le travail illégal. Ces dix derniers mois, elle a effectué 209 opérations ciblées dont 65% de contrôles révélés positifs et 367 actions aléatoires. Ce qui se traduit par la modique somme de 3 millions d’euros dus par les établissements délictueux.
Christine et Sylvain entrent dans le restaurant. Derrière son comptoir, la responsable les accueille. « Oui, oui… C’est un contrôle ? Faites. Il n’y a pas de problème ». Tout en feuilletant le registre unique du personnel, Sylvain débute par une série de questions pendant que Christine se rend en cuisine. La patronne est stressée mais elle reste calme. Ses yeux balaient la salle d’un bout à l’autre. Au gré de ses allers et venues, la serveuse envoie les plats, commande les cafés au passage et interrompt à plusieurs reprises la conversation pour l’encaissement des additions. La patronne enregistre l’information mais elle panique : « je ne sais plus où j’ai mis le numéro de l’expert comptable… ». On aperçoit Christine à travers le passe-plats. Le tableau de présence sur lequel doivent figurer les jours et heures effectives est affiché sur la porte, à l’intérieur de la cuisine. Les deux employées ont rempli un « procès-verbal d’audition salarié », soit une trentaine de question sur leurs pratiques, leur activité au moment du contrôle. En un rien de temps, les déclarations sont recoupées. La serveuse est en CDI, du lundi au vendredi, trois heures par jour de 11h30 à 14h30. La cuisinière en fait deux de plus, de 10h30 à 15h30. Tout semble correct. « Nous sommes en plein service et c’est la première fois que je suis contrôlée, explique la responsable. Je ne me souvenais même plus du prénom de mes employées. Je trouve cela normal même si ce n’est pas évident à gérer. » En huit années de terrain, Christine en a vu d’autres. Elle rassure d’un « ça revient vite quand c’est vrai ! On va faire des vérifications. Vous ne devriez pas avoir de nos nouvelles, à priori ». La professionnelle reste prudente. Le restaurant quant à lui, semble tout entier soulagé. Les deux inspecteurs quittent le lieu. « Elle était un peu paniquée, c’est vrai. Je le prends comme un bon signe car souvent, ceux qui n’ont rien à se reprocher, sont dans cet état. Les autres ont un aplomb incroyable ! Maintenant nous rentrons examiner le bordereau de déclaration, les heures, les bulletins de salaires et contrats de travail que nous avons demandés. On jugera après».
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