L'Actualité
De ma thébaïde et ce depuis des années, voilà que je propose des écrits quotidiens uniquement consacrés à Eze. (Histoire d'Eze)
Cette
entreprise est fondée sur le roc même qui abritera un jour nos mânes, image tout
à la fois du provisoire et de l'éternité.
Savoir à qui et à quoi l'on appartient garantit généreusement aux plus nomades
d'entre nous un port d'attache et une ancre flottante.
Ici, à Eze, ce savoir bien sommaire somme toute tient lieu de sagesse aux plus
insensés. Ces derniers croyaient au progrès, à l'Urbs, à la Pax Romana et les
voilà emportés par le tourbillon.
Mais, pourtant, sages ils étaient. Devenus voyageurs du temps, leurs os
blanchissent toujours au soleil d'Eze comme leurs cheveux dont la couleur, nous
dit le Livre, leur sied comme au roi une couronne blanche...
Puis vint le temps de la Barbarie. Pour être récent, il n'est pas pour autant
neuf! Depuis que l'homme est l'homme, la tentation pousse vers le bas quiconque
veut aller vers le haut. Douloureux prix à payer pour un si piètre voyage!
En regardant ce qui fut, en contemplant ce qui est, le regard converge et
diverge du regret vers les larmes... Ces dernières qui, il y a bien longtemps,
auraient poussé un Romain à se coucher sous le plus vieil olivier et y attendre
la mort, encouragent le contemporain que je suis à témoigner modestement au
procès muet fait à nos pairs, à nos pères.
Je sais ce que je sais, rien de plus mais si ceux qui firent virer notre sourire
en grimace portaient à leurs visages blêmes la sérénité des dieux, je serais
prêt à les rejoindre. Or, Cher Lecteur, rien de tout cela.
Donnez-leur l'Olympe et ils y font couler le Styx, confiez-leur la garde du Mont
Athos et Déméter devient leur servante.
Bien heureusement, un temps le village d'Eze, Nouvel Eleusis, souffla le chaud
et l'effroi sur leurs troupeaux mais leur "vertu" est l'attachement comme celui
qui rive le bernard l'hermite à sa conque et le coucou au nid des autres.
Cette modeste entreprise tentera, sans grande difficulté, de ranimer la flamme
jamais éteinte de ceux qui brûlaient d'un feu intérieur. Comme Chrétien de
Troyes passait déjà sous leurs fenêtres et leurs crachats, nous sommes des
"Chevaliers à la charrette" ayant pour seule arme le "bel françois" comme un peu
plus tard la langue de Dante, le géographe mystique...
Mais c'est aujourd'hui que nous vivons.
Les quatre Saisons! Cette année comme d'autres quiconque n'a pu consigner notre
absence. Qu'il vente, qu'il pleuve, le gardien est à son phare et ranime la
flamme qui prévient le marin des écueils. On lui prête des ambitions divines
mais son serment est de toujours s'éloigner d'Alexandrie et des semblants de
pouvoir. De ce dernier, le sage ne veut et laisse aux zéros à la Sisyphe le
sport cruel de devoir creuser eux-mêmes leurs tombes d'autant plus profonde
qu'ils ont voulu élever au plus haut le pinacle de leur mausolée.
En un mot, j'espère que vous trouverez du plaisir au fil de ces pages et,
peut-être, des illustrations de la vertu du microcosme.
Simple comme une herbacée, il illustre sans frais les errements de la forêt.
Eze-Village au nom surfait (village bien sûr) n'a jamais voulu défier les
"dieux".
Le "monde", sorte de démiurge myope, le rencontra lors de ses mouvements
pérégrins et lui trouva du charme.
Si le Roi aime les bergères, le berger aime les princesses déchues et c'est des
atours de cette dernière qu'il l'a revêtue. L'indigène, bon bougre, lui trouve
des excuses et à son perpétuel procès tente d'établir que la malheureuse fut
prise de force. Il n'est, pourtant, de bonne plaidoirie qui ne se termine par un
verdict. Or, celui d'Eze fut sans appel : A Nice tu seras attachée, puis en
produit tu seras transformée, ta nature sera déflorée puis ta Gens dispersée.
Ô visiteurs mes amis, joignez ceux de Rome et d'Athènes. Pleurez donc sur la
mort d'une âme et avant qu'elle ne passe daignez lui offrir un regard. Car il
s'agit bien là de l'histoire d'Eze.
Ceci dit sans amertume, ni dépit.
A bord du vaisseau qui sombre le naufrage est d'autant moins éprouvant que son
équipage ne peut se reconnaître dans son capitaine. Il reste donc les souvenirs.
Ils sont notre richesse et nul ne saurait nous les retirer.
C'est eux que je voudrais partager avec vous dans la joie qui préside au
banquets de Platon. Raison pour laquelle, au demeurant, j'ai tenté d'orner ce
site le plus que j'ai pu le faire de photographies et autres témoignages
démontrant la joie de vivre qui sourdait de chaque pierre, autant dire de chaque
âme.
Le mot est lâché : l'âme. Elle ne fait pas recette mais elle en est une. Celle
de la survie au milieu des drôles qui ne font rire personne.
Je n'aurais pas écrit ce qui précède voilà quelques années, trop pénétré à tort de
l'idée que mon entreprise était vaine. Aujourd'hui, sûr des témoignages qui me
parviennent, j'ose persévérer au nom même du désintéressement qui anime cette
entreprise. De façon contradictoire elle me valut des récompenses sans prix. Ce
dernier n'est pas mesurable et a donc plus de valeur que tous les trésors.
Entre-temps, les Barbares vociférèrent, s'agitèrent, tempêtèrent, réprimèrent,
légiférèrent et, ce faisant, s'enfoncèrent d'autant plus facilement dans la
glèbe fatidique qu'ils en viennent et qu'elle est leur berceau:!.
L'histoire est un bon juge. Elle donne raison à la patience. Entre-temps,
continuons donc à édifier modestement le petit édicule fait de choses tangibles
qui rappelle qu'ici des hommes et des femmes vécurent. C'est aussi simple que
cela.
Enfin, soyons franc. Le fait que les miens eussent ici leur berceau de tous
temps ne saurait faire de moi un arbitre impartial. Aussi, est-ce bien la raison
pour laquelle de tous les reproches qui pourraient m'être faits à juste titre,
s'il en est un que j'accepte le plus, c'est bien celui de n'être pas objectif.
La faiblesse de mes moyens me permet cette audace et la force qui les anime est
sa seule excuse absolutoire.
Ecrivez-moi et cela surtout si vous n'êtes pas d'accord avec moi.

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Xavier Cottier
xaviercottier@aol.com
PS : Consultez le
site de Nice Première et surtout cet article sur la Marseillaise. Je luis
dois, de façon toute contradictoire, de reprendre ces écrits. De Cemenelum, en
passant par la dédition de 1388, à Garibaldi, Gambetta ou Auguste Blanqui, ce
Comté n'a pas cessé d'engendrer des amours tumultueux entre la plus que jamais
latine Italie et sa cousine France, partagée depuis Mérovée par le septentrion
du fleuve Loire, siège du pouvoir aux pieds duquel le grand Sud sembla ne jamais
vouloir se jeter éperdument. C'est bien de cette histoire là qu'il s'agit, faite
aussi de notre quotidien - qui nous rend plus "journaliers" qu'acteurs -
lui-même fruit de ces siècles contrastés. L'auteur de ces lignes, tout
descendant de François Malausséna qu'il est, donnera la parole à ceux qui
votèrent NON en 1860, à Garibaldi, à Gambetta et à tous ceux - j'ai le sentiment
qu'ici ils sont légions - qui ont quelque chose à dire ! A vos claviers et
rameutez vos pensées car il est temps de répondre aux questions, surtout à
celles que personne ne pose...




